Bivalence
« La patiente est incapable de parler ni de comprendre le moindre mot. Il lui arrive parfois de proférer des sons inarticulés et incohérents durant des heures. Elle n'a aucun sens des personnes, des lieux et du temps. Elle réagit cependant à l'énoncé de son propre nom.
Il y a six mois que je m'occupe d'elle, mais elle montre toujours une totale indifférence à son aspect physique et ne fait aucun effort pour aider aux soins qu'on lui donne.
Il faut la laver, l'habiller, lui donner à manger. Comme elle n'a pas de dents, il faut lui écraser ses aliments. Elle bave sans arrêt de sorte que, devant, sa chemise est presque toujours sale.
Elle ne peut pas marcher.
Ses heures de sommeil sont totalement irrégulières. Elle s'éveille souvent au milieu de la nuit et réveille son entourage par ses cris.
La plupart du temps elle est gentille et de bonne humeur, mais plusieurs fois par jour, elle s'agite sans cause apparente, se met à pleurer et ne cesse de crier que si quelqu'un vient la consoler.
C'est par la description de ce cas clinique que je commençai un jour une conférence à des infirmières déjà diplômées, sur "les aspects physiques du vieillissement".
Je leur demandais ensuite quels sentiments elles éprouveraient à s'occuper de cette patiente. Les mots qui revinrent les plus souvent dans leurs réponses furent : désespérant, déprimant, pénible.
Je leur déclarai alors que j'avais grand plaisir à soigner cette personne et qu'elles en auraient autant que moi
Devant leur regard incrédule, je fis passer à la ronde une photo, celle de mon bébé de six mois.
Pourquoi est-il donc tellement plus difficile de s'occuper d'une femme de quatre-vingt-dix ans que d'un nourrisson ?
À l'évidence, ce n'est pas seulement une question de poids. La raison en est plus profonde.
Le bébé, et sur ce point toutes les infirmière furent d'accord avec moi, représente l'espoir et des possibilités quasiment infinies.
N'y aurait-il pas lieu de changer d'attitude, afin de donner à ceux qui achèvent leur vie dans l'impuissance de la vieillesse les mêmes soins qu'à ceux qui la commencent ? »
Dr Paul E. Ruskin, Journal of American Medical Association, 1984.
Il y a six mois que je m'occupe d'elle, mais elle montre toujours une totale indifférence à son aspect physique et ne fait aucun effort pour aider aux soins qu'on lui donne.
Il faut la laver, l'habiller, lui donner à manger. Comme elle n'a pas de dents, il faut lui écraser ses aliments. Elle bave sans arrêt de sorte que, devant, sa chemise est presque toujours sale.
Elle ne peut pas marcher.
Ses heures de sommeil sont totalement irrégulières. Elle s'éveille souvent au milieu de la nuit et réveille son entourage par ses cris.
La plupart du temps elle est gentille et de bonne humeur, mais plusieurs fois par jour, elle s'agite sans cause apparente, se met à pleurer et ne cesse de crier que si quelqu'un vient la consoler.
C'est par la description de ce cas clinique que je commençai un jour une conférence à des infirmières déjà diplômées, sur "les aspects physiques du vieillissement".
Je leur demandais ensuite quels sentiments elles éprouveraient à s'occuper de cette patiente. Les mots qui revinrent les plus souvent dans leurs réponses furent : désespérant, déprimant, pénible.
Je leur déclarai alors que j'avais grand plaisir à soigner cette personne et qu'elles en auraient autant que moi
Devant leur regard incrédule, je fis passer à la ronde une photo, celle de mon bébé de six mois.
Pourquoi est-il donc tellement plus difficile de s'occuper d'une femme de quatre-vingt-dix ans que d'un nourrisson ?
À l'évidence, ce n'est pas seulement une question de poids. La raison en est plus profonde.
Le bébé, et sur ce point toutes les infirmière furent d'accord avec moi, représente l'espoir et des possibilités quasiment infinies.
N'y aurait-il pas lieu de changer d'attitude, afin de donner à ceux qui achèvent leur vie dans l'impuissance de la vieillesse les mêmes soins qu'à ceux qui la commencent ? »
Dr Paul E. Ruskin, Journal of American Medical Association, 1984.
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