Ridelles et bonheurs du soir

Demain est le premier jour du temps qui me reste à vivre. Quand ce temps qui reste à vivre diminue, ce demain devient précieux et mérite qu’on y accorde une importance accrue. Et s’il nous échoyait d’inventer cette médecine à jour frisant susceptible de réinstaller nos aînés dans leur véritable existence et non dans une vie par procuration?

Ma photo
Nom :
Lieu : Anderlecht, Bruxelles, Belgium

dimanche, février 21, 2010

Vie et mort

 Quand tu puises de l’eau dans un seau,
Ce n’est pas à ce moment que l’eau vient à la vie ;
C’est l’eau de l’univers entier
Que tu puises dedans le seau.

Quand l’eau du seau est tarie,
Dispersée sur la terre mère,
Ce n’est pas à ce moment que l’eau disparaît,
C’est l’eau de l’univers entier
Répandue jusque dans l’entièreté de l’univers.

L’homme naît :
Ce n’est pas à ce moment, que la vie vient à la vie ;
C’est la vie de l’univers entier
Puisée dans cette parcelle de pensée
Que je nomme « je ».

L’homme meurt :
Ce n’est pas à ce moment, que la vie disparaît :
C’est la vie de l’univers entier
Répandue de la parcelle de pensée que je nomme « je »
Jusqu’au sein de l’entièreté de l’univers.

    Kosho Uchiyama

mercredi, février 17, 2010

Sagesse de Stéphane Zweig

Plus douce est la ronde des heures,  Quand les cheveux déjà grisonnent,  C'est lorsque la coupe se vide,  Que l'on peut voir l'or au fond.   Le pressentiment des ténèbres prochaines  N'effraie pas,il soulage!   Seul peut goûter la joie de contempler le monde  Celui qui ne désire plus rien,  Qui ne demande plus où il est arrivé  Qui ne pleure plus de ce qu'il a perdu  Et pour qui vieillir n'est que les prémices de son départ.    Jamais la vue n'est plus étincelante et libre  Qu'à la lumière du couchant,  Jamais on n'aime plus sincèrement la vie  Qu'à l'ombre du renoncement.  

Stefan Zweig

dimanche, novembre 09, 2008

la simplicité rend aveugle

Les aspects des choses les plus importants pour nous sont cachés par leur simplicité et leur familiarité. (Nous sommes incapables de remarquer ce qui est toujours sous nos yeux.) L'homme n'est nullement frappé par les fondements réels de sa recherche (Wittgenstein ').


L'homme qui prenait sa femme .id

l'oubli la vie

1\ faut commencer à perdre la mémoire, ne serait-ce que par bribes, pour se rendre compte que cette mémoire est ce qui fait toute notre vie. Une vie sans mémoire ne serait pas une vie (...) Notre mémoire est notre cohérence, notre raison, notre sentiment, et même notre action. Sans elle, nous ne sommes rien (...) (Je ne peux qu'attendre l'amnésie finale, celle qui effacera une vie entière, comme cela s'est passé

pour ma mère...) (Luis Buuel 2).

Oliver Sacks L'homme qui prenait ssa femme pour un chapeau Essais  Points Seuil 1988 280p p41

samedi, mars 24, 2007

rêve et vieux

Seuls rêvent ceux qui ont beaucoup vécu : les vieux.

Antonio Porchia
Voices

mercredi, avril 19, 2006

De la maladie

"On n'a rien compris à la maladie tant que l'on a pas compris son étrange ressemblance avec l'amour et la mort: ses compromis, ses feintes, cet étrange et unique amalgame fait du mélange d'un tempérament et d'un mal".

Les mémoires d'Hadrien. M.Yourcenar.

De la vieillesse

La vieillesse représente une étape de notre existence et, comme toutes les autres étapes, elle a son propre visage, une atmosphère et une ambiance spécifiques, ses joies et ses peines. Nous
qui portons des cheveux blancs, nous sommes comme nos frères humains plus jeunes: nous avons une mission qui donne sens à notre vie.

Celui qui se meurt, atteint d'un mal fatal, a lui aussi sa mission à remplir, a quelque chose d'important, d'indispensable à réaliser alors même qu'il est à peine capable de percevoir un appel venu d'ici-bas. Etre vieux représente une tâche aussi belle et sacrée que celle d'être
jeune ou de se familiariser avec la mort. Mourir constitue par ailleurs un acte aussi important que les autres- à condition qu'il s'accomplisse dans le profond respect du sens et du caractère sacré de toute existence. Un homme âgé qui abhorre et craint la vieillesse, les cheveux blancs et la proximité de la mort, ne représente pas dignement l'étape de l'existence qu'il a atteinte, tout
comme un jeune homme vigoureux qui déteste son métier, son travail quotidien et cherche à y échapper.
Herman Hesse

Feuille morte

Toutes les fleurs veulent se changer en fruits,
Toute matinée veut devenir soirée,
Sur terre rien n'est éternité,
Si ce n'est le mouvement, le temps qui fuit.
Même le plus bel été veut voir une fois
La nature qui se fane, l'automne qui vient.
Reste tranquille, feuille, garde ton sang-froid
Lorsque le vent veut t'enlever au loin.
Poursuis tes jeux et ne te défends pas,
Laisse les choses advenir sans heurts,
Laisse enfin le vent qui te détacha
Te conduire jusqu'à ta demeure.

Herman Hesse

Esquisse

Le vent froid de l'automne siffle dans les ajoncs desséchés
Qui blanchissent dans la lumière du soir;
Les corneilles quittent les saules et volent vers l'intérieur des terres.
Un vieil homme se repose, seul sur la grève,
Il sent le vent dans ses cheveux, la nuit et la neige qui vient. Depuis la rive plongée dans l'ombre il regarde vers la clarté, Là-bas, entre nuages et lac, une bande De terre éloignée brille encore dans la lumière chaude: Au-delà merveilleux, règne de félicité comme le rêve et la poésie.
Il fixe du regard cette image lumineuse,
Repense à son pays, aux années de bonheur,
Voit pâlir l'or, le voit disparaître,
Se détourne, quitte les saules
Et marche lentement vers l'intérieur des terres.

Herman Hesse. Eloge de la vieillesse

lundi, mars 27, 2006

Instructions pour remonter une montre

Là-bas au fond il y a la mort, mais n'ayez pas peur. Tenez la montre d'une main, prenez le remontoir entre deux doigts, tournez-le doucement. Alors s'ouvre un nouveau sursis, les arbres déplient leurs feuilles, les voiliers courent des régates, le temps comme un éventail s'emplit de lui-même et il en jaillit l'air, les brises de la terre, l'ombre d'une femme, le parfum du pain.

Que voulez-vous de plus? Attachez-la vite à votre poignet, laissez-la battre en liberté, imitez-la avec ardeur. La peur rouille l'ancre, toute chose qui eût pu s'accomplir et fut oubliée ronge les veines de la montre, gangrène le sang glacé de ses rubis.

Et là-bas dans le fond, il y a la mort si nous ne courons pas et n'arrivons avant et ne comprenons pas que cela n'a plus d'importance.

Julio Cortazar in Cronopes et Fameux, 1962

vendredi, mars 17, 2006

La mémoire trie

"Heureusement la mémoire trie. Elle sait les morts auxquels elle s'appuie, elle vit d'eux comme des autres vivants. Il n'y a pas de mort. Je peux fermer les yeux, j'aurai mon paradis dans les coeurs qui se souviendront "

Maurice Genevoix. Trente mille jours

samedi, mars 11, 2006

Les âges de la vie

"La comparaison des quatre saisons de l’année avec les quatre âges de la vie est une vénérable sottise. Ni les vingt premières années de la vie, ni les vingt dernières ne correspondent à une saison, si l’on ne se contente pas, pour la comparaison, de la blancheur des cheveux et de la neige, ni de semblables jeux de palette. Ces vingt premières années sont, en somme, une préparation à la vie, à toute l’année de la vie, sorte de long jour de Nouvel An ; et les vingt dernières années embrassent d’un seul regard, intériorisent, joignent et accordent ensemble tout ce que l’on a pu vivre auparavant, comme on le fait, en petit, chaque soir de la Sylvestre pour tout l’année écoulée. Mais le fait est que, dans l’intervalle, se place une période qui suggère tout naturellement la comparaison avec les saisons ; c’est la période de la vingtième à la cinquantième année ... Ces trois fois dix ans correspondant à trois saisons : l’été, le printemps et l’automne - d’hiver, la vie humaine n’en a pas, à moins que l’on ne veuille appeler l’hiver de l’homme les périodes de maladie, âpres, froides, solitaires, désolées, infécondes, qui s’y insèrent assez souvent.

La vingtaine : années brûlantes, accablantes, orageuses, luxuriantes, pendant lesquelles on apprécie la journée sur le soir, quand elle est finie, en s’épongeant le front, années pendant lesquelles le travail nous semble ardu, mais nécessaire, — elles sont, de vingt à trente ans, l’été de la vie.
De trente à quarante, en revanche, elles en sont le printemps : un air tantôt trop chaud, tantôt trop froid, toujours agité et stimulant, une sève jaillissante, partout une profusion de feuilles, de floraisons embaumées, beaucoup de matinées et de nuits enchanteresses, un travail pour lequel c’est le chant des oiseaux qui nous éveille, un vrai travail à cœur joie, sorte de jouissance de notre propre vigueur, renforcée par un avant-goût d’espérance.
Enfin la quarantaine : années mystérieuses comme tout ce qui tient immobile ; semblables à un haut plateau vaste et montagneux sur lequel court un vent frais ; avec un ciel limpide et pur par-dessus, son regard posé sur le jour et jusqu’au cœur des nuits avec toujours la même clémence ; c’est le temps de la récolte et de la plus cordiale gaieté ; c’est l’automne de la vie."


Nietzsche, F. Humain, trop humain : un livre pour esprits libres ; texte établi par G. Colli et M. Montinari ; traduit de l’allemand par Robert Rovini. [Paris] : Gallimard, 1991, c1988 (cote : 193 N677h

vendredi, mars 10, 2006

Le poids des âges

Pour le jeune homme, dont la vieillesse ne marque pas le visage, la jeunesse est sans valeur.

Abu Shakour
Extrait de Les premiers poètes persans


Estoy solo y no hay nadie en el espejo.

Jorge Luis Borges (1899-1986) Escritor Argentino

mercredi, mars 08, 2006

Se faire lumière du soir

La lumière crue de midi
éclaire sans pitié les objets et les choses.
Sans ombres où se protéger,
elle me brûle les yeux,
assassine mon coeur.

J'aime la lumière du soir
qui réchauffe le sable,
effleure les contours,
caresse les sommets,
et laisse aux ombres
la part du doute.

Cette lumière douce,
aux multiples nuances,
pénètre sans violence,
et je peux regarder.

Toi qui me soignes,
quand tu me parles
de ce mal
que je ne peux pas nommer,
s'il te plaît,
fais-toi lumière du soir.

Christiane GLEIZE

Texte repris par trois étudiant(e)s
dans le cadre de leur travail d’évaluation du cours d’Introduction à la médecine générale (session 1999-2000) .

Gabriel Garcia Marquez nous dit adieu

Gabriel Garcia marquez a abandonné la vie publique pour des raisons de santé : cancer lymphatique. Dernièrement sa situation s'aggrave. Il a envoyé une lettre d'adieu à ses amis, et grâce à Internet, elle est diffusée à travers le réseau. Je vous recommande de la lire car cette courte lettre écrite par un des latino-américains des plus brillants des derniers temps est très touchante : " Si pour un instant Dieu m'offrait un morceau de vie, je profiterais de ce temps le plus possible. "Je suppose que je ne dirais pas tout ce que je pense, mais en définitif je penserais tout ce que je dis. Je donnerais une valeur aux choses, pas pour ce qu'elles valent, mais pour ce qu'elles signifient. Je dormirais peu, je rêverais plus, Je crois que chaque minute passée les yeux fermés représente soixante secondes en moins de lumière. Je marcherais quand les autres s'arrêtent, Je me réveillerais quand les autres dorment. Je prouverais aux hommes combien ils se trompent en pensant qu'on ne tombe plus amoureux en vieillissant et qui ne savent pas qu'on vieillit lorsqu'on cesse de tomber amoureux. Je donnerais des ailes à un enfant, mais je le laisserais apprendre à voler seul. J'enseignerais aux vieux que la mort ne vient pas avec l'âge, mais avec l'oubli.

J'ai appris tant de choses de vous, vous les hommes. J'ai appris que tout le monde veut vivre au sommet de la montagne, sans savoir que le véritable bonheur réside dans la manière de l'escalader. J'ai appris que quand un nouveau-né serre fort de son petit poing, pour la première fois, la main de son père, il le retient pour toujours. J'ai appris qu'un homme n'a le droit d'en regarder un autre de haut que pour l'aider à se lever. J'ai appris tant de choses de vous, malheureusement elles ne me serviront plus à grand-chose, Car lorsqu'on me rangera dans ce coffre, je serai malheureusement mort.

Dis toujours ce que tu sens, et fais ce que tu penses. Si je savais que je te vois dormir aujourd'hui pour la dernière fois, je t'embrasserais très fort et je prierais le Seigneur pour pouvoir être le gardien de ton âme. Si je savais que ce sont les dernières minutes où je te vois, je te dirais " je t'aime ", sans présumer bêtement que tu le sais déjà. Il y a toujours un lendemain, et la vie nous donne une autre occasion de faire bien des choses, mais si jamais je me trompe et que je n'ai plus que ce jour, j'aimerais te dire combien je t'aime et que je ne t'oublierai jamais. Le lendemain n'est garanti à personne, qu'il soit jeune ou vieux. Aujourd'hui peut être le dernier jour où tu vois ceux que tu aimes. N'attends pas, fais-le aujourd'hui, car si demain ne vient pas, tu regretteras sûrement de n'avoir pas pris le temps d'un sourire, d'une caresse, d'un baiser,car tu étais trop occupé pour pouvoir faire plaisir. Garde près de toi ceux que tu aimes, dis-leur à l'oreille combien tu as besoin d'eux, aimes-les et traites-les bien, prends le temps de leur dire " je regrette ", " pardonne-moi ", " s'il te plait ", " merci " et tous les mots d'amour que tu connais. Personne ne se souviendra de toi pour tes pensées secrètes. Demande au Seigneur la force et la sagesse de les exprimer. Montre à tes amis et aux êtres chers combien ils sont importants pour toi."

Gabriel Garcia Marquez . (Prix Nobel de littérature 1982)

Lettre à un jeune stagiaire .

"II vaut mieux être riche et en bonne santé que pauvre et malade"

Vous allez commencer vos stages cliniques, entrer dans le cercle privilégié des hommes et des femmes qui ont décidé de soigner leurs semblables. C’est plus qu’un métier ou qu’une vocation, c’est réellement un art; en effet, il faut au médecin, bien plus que de l’intelligence ou du dévouement, il doit avoir ce que Harisson appelait « un sens quasi shaekespecirien de l’être humain », du tact, du bon sens. L’intelligence est un bien indispensable, la gentillesse est plus que souhaitable mais votre sourire et votre tact feront de vous un bon médecin. Si vous parvenez à décrocher un sourire à votre patient, vous avez déjà beaucoup avancé dans son traitement car il vous fait confiance, il vous écoutera, il se sentira rassuré.

1. Respectez le secret de votre patient; la Belgique est un petit pays où tout le monde se connaît, ne l’oubliez jamais; les ascenseurs et les couloirs des h6pitaux sont propices au bafouement du secret médical;
2. Ecoutez votre patient et n’étiquetez pas trop vite un patient de « psychiatrique », l’erreur est tellement malheureuse;
3. « Rien de ce qui est humain n’est étrange ou repoussant », Harisson; tous les patients ont droit à vos soins, qu’ils soient compliants ou insupportables, bêtes et méchants ou tout à fait charmants, dépressifs ou alcooliques, fumeurs ou drogués;
4. Un « beau cas » est quelque chose de relatif;
5. N’oubliez jamais que les pourcentages et les statistiques ne valent que pour une population et non pour une personne. La réussite, c’est comme l’échec, c’est toujours 100 % pour celui à qui ça arrive. Pour lui, peu importent les 99 autres;
6. Un train peut en cacher un autre; vous devez toujours pouvoir vous remettre en question; acceptez les remarques des autres comme des conseils, c’est comme cela que vous progresserez;
7. Ne laissez pas un patient faire ses exercices de marche dans le couloir avec sa blouse d’h6pital ouverte dans le dos, qui permet à tous les passants de voir qu’il porte un lange;
8. Respectez l’intimité d’un patient qui est sur la panne, c’est déjà tellement humiliant;
9. Quand vous demandez un sédiment urinaire ou une coproculture, imaginez-vous devoir remplir vous-mêmes ces tout petits pots;
10. N’oubliez jamais d’aider la personne que vous venez d’examiner à rattacher son soutien-gorge, à reboutonner son pyjama ou à lui ouvrir la porte;
11. Restez toujours souriants. Le sourire peut exprimer tous les sentiments, de la joie à la sympathie en passant par la colère ou la révolte; sourire ne veut pas dire se moquer mais comprendre;
12. Votre patient ne comprend pas les termes médicaux. N’oubliez pas qu’avant de commencer vos longues études, vous ne saviez probablement pas à quoi ressemblait une vertèbre, comment on écrit anamnèse ou encore où se trouve la rate;Ce ne sont là que quelques petits détails de la vie quotidienne du médecin. Ils sont importants. Un jour, un patient vous dira merci pour un petit détail de ce genre, il vous appréciera, vous fera confiance et vous connaîtrez grâce à lui (grâce à vous?) la vraie relation médecin-patient. C’est ce patient-là qui vous fera apprécier votre métier.

Certains pensent qu’on est soit médecin soit malade. Méfiez-vous de la maladie, elle peut toucher tout le monde, mime vous. Je ne vous souhaite pas de vous retrouver de l’autre c6té de la barrière mais il serait peut4tre utile à la formation du médecin de se retrouver dans un lit d’h6pital, avec une de ces blouses béantes, à voir des médecins quelques minutes par jour qui se tiennent au pied de votre lit (comme s’ils avaient peur de tomber) pour vous dire, dans une ambiance bien souvent très (trop) solennelle que les examens sont rassurants mais qu’il faut compléter les investigations. Ça veut dire quoi exactement? Pourquoi est-ce qu’ils chuchotent en s’éloignant de votre lit?

N’oubliez pas que les médecins sont les pires des patients, ils veulent savoir, ils posent des questions, ils sont tout simplement étiquetés « d’insupportables » par le personnel soignant... Pour vous faire réfléchir, voici une petite réflexion (assez habituelle d’ailleurs) d’un médecin à une stagiaire qui se plaignait d’aménorrhée (sympt6me pour le moins suspect quand on a l’âge d’être stagiaire): « si tu allais moins voir dans tes bouquins, tu serais moins malade »; elle avait un adénome hypophysaire. A méditer...Je ne veux en aucun cas jouer au Professeur ou au Conseiller spirituel mais demandez-vous toujours, quand vous vous trouverez en face d’un patient, ce que vous feriez, demanderiez, souhaiteriez, regretteriez si vous étiez dans sa situation, qui est toujours plus mauvaise que la v6tre...

Christine REUS

PS . Merci pour cette bonne idée d’examen. J’espère que ça fera réfléchir mes futurs collègues autant que moi-même sur l’importance d’une relation de confiance avec son patient... Bonne lecture. Joyeux Noêl et Bonne Année 2000!
Examen d’Introduction à la Médecine Générale. MED 23 23 décembre 1999

mardi, mars 07, 2006

Proverbes et aphorismes sur la vieillesse

« On vieillit comme on a vécu » Julian Ajuriaguerra
« Il est impossible de vous dire mon âge, il change tout le temps » Alphonse Allais
« Les ours blancs sont blancs parce que ce sont de vieux ours » Alphonse Allais
« Ce n'est pas que j'ai peur de mourir. Je veux juste ne pas être là quand ça arrivera. » Woody Allen
« Je tiens beaucoup à ma montre, c'est mon grand-père qui me l'a vendue sur son lit de mort » Woody Allen
« Prendre un coup de vieux ne signifie pas nécessairement qu'on se fait frapper par un octogénaire » Anonyme
« On n'est vieux dès qu'on n'a que des certitudes; la jeunesse doute de tout » Anonyme
« Si tu ne mord pas la vie à pleines dents, c'est qu'elles sont dans un verre d'eau » Anonyme
« Cacher son âge c'est supprimer ses souvenirs. » Arletty
« Vieillir, c'est encore le seul moyen qu'on ait trouvé pour vivre longtemps » Jean-Louis Aubert
« Une sottise dite par une vieille bouche est aussi sotte que dite par de jeunes lèvres » Marcelle Auclair
« Ceux qui refusent à penser " vieillesse " vieillissent bien moins vite et plus harmonieusement que ceux pour
qui leur date de naissance est une obsession » Marcelle Auclair
« Je me suis rendu compte que j'avais pris de l'âge le jour où j'ai constaté que je prenais plus de temps
à bavarder avec les pharmaciens qu'avec les patrons de bistrot » Michel Audiard
« Un bon mari ne se souvient jamais de l'âge de sa femme, de son anniversaire toujours » Jacques Audiberti
« Si vous n'allez pas aux funérailles des gens, ils ne viendront pas aux vôtres » Auteur non connu
« Il appréciait la retraite. Ce qui le chagrinait toutefois c'était de ne pas avoir de congés payés ! » Auteur non connu
« Courageusement, il a demandé de ne pas être endormi avant son autopsie » Auteur non connu
" C'est surtout les jeunes vieux qui n'aiment pas les vieux vieux "» Auteur non connu
« La gérontologie, c'est l'art d'accommoder les restes » Auteur non connu
« A mesure que nous vieillissons, ce sont nos maux qui rajeunissent » Auteur non connu
« On ne devient vieux que le jour où l'on s'arrête de vivre alors que la vie continue. » Claude Aveline
« Les vieux se répètent et les jeunes n'ont rien à dire. L'ennui est réciproque » Jacques Bainville
« Le secret de la jeunesse est d'être honnête, de manger lentement et de mentir
sur son âge. » Lucille Ball (actrice américaine)
« Les vieillards sont assez enclins à doter de leurs chagrins l'avenir des jeunes gens » Honoré de Balzac
« Les pleurs des vieillards sont aussi terribles que ceux des enfants sont naturels » Honoré de Balzac
« Un vieillard est un homme qui a dîné et qui regarde les autres manger » Honoré de Balzac
« L'homme meurt une première fois à l'âge où il perd l'enthousiasme » Honoré de Balzac
« Passé 60 ans, quand on se réveille sans avoir mal quelque part, c'est qu'on est mort. » Ricet Barrier
« Un homme n'est vieux que quand les regrets ont pris, chez lui, la place des projets » Ethel Barrymore
« Les rides de la vieillesse ne devraient indiquer que les emplacements des sourires de la jeunesse »
Ethel Barrymore
« Je ne serai jamais vieux. Pour moi, être âgé c'est avoir quinze ans de plus que moi. » Bernard Baruch
« Non, le vieillard n'est pas un mortel qui finit, c'est un immortel qui commence » Baunard ( Mgr )
« La vieillesse est le noviciat de la mort » abbé Bautain
« L'âge se mesure aussi au nombre de ceux que nous avons perdus comparé au nombre de ceux qui nous restent » Hervé Bazin
« A 20 ans, la femme n'a pas les yeux dans sa poche. A 40 ans, elle a les yeux dans vos poches.
A 60 ans, elle a des poches sous les yeux. » Eugène Beaumont
« Le vieillissement est un voyage sans retour. Mais, on peut toujours choisir la vitesse du moyen de transport. »
Jean-Baptiste de Beauvais
« Pour un homme qui se sent bien dans sa peau, qui est satisfait de sa condition et a de bons rapports avec son entourage, l'âge demeure abstrait » Simone de Beauvoir
« Les hommes se contentent de tuer le temps en attendant que le temps les tue. » Simone de Beauvoir
« L'âge mûr, c'est quand vos camarades de lycée sont si ridés et si chauves qu'ils ne vous reconnaissent plus »
Enoch Bennet
« L'intérêt qu'elle portait à l'histoire naturelle était limité à l'observation des pattes d'oie qui se formaient
autour de ses yeux » Eric Bentley
« La vieillesse est comparable à l'ascension d'une montagne. Plus vous montez, plus vous êtes fatigué et hors d'haleine, mais combien votre vision s'est élargie ! » Ingmar Bergman
« A 650 ans, Mathusalem était si bien conservé qu'il n'en paraissait guère plus de 375 » Tristan Bernard
« Je l'ai revu l'autre jour. Il avait tellement changé qu'il ne m'a pas reconnu. » Tristan Bernard
« Jeune on est beau comme un cœur. Vieux on est beau comme un pace-maker » Michèle Bernier
« On peut très bien avoir 60 ans sur son acte de naissance, 40 à la ville et 20 dans un lit. » Dr. Julien Besançon
« Crever gros ? Crever maigre ? La différence est pour les porteurs. » Francis Blanche
« Gravé sur la tombe d'un hypocondriaque : "Quand je vous le disais que j'étais malade" » Francis Blanche
« On n'a que l'âge de ses obsèques » Francis Blanche
« Le drame de notre époque, c'est que la plupart des gens ne respectent l'âge que lorsqu'il est en bouteille »
Antoine Blondin
« Faire trop longtemps la même chose au même endroit, à la même heure, cela rend vieux » Christian Bobin
« Chaque âge a ses plaisirs, son esprit et ses mœurs. » Nicolas Boileau
« Il n'est rien de plus vieux qu'un vieux sans illusion » Serge Bouchard
« L'âge est une donnée biologique socialement manipulable et manipulée » Pierre Bourdieu
« Un jour viendra où l'absence totale de rides constituera le seul moyen de déceler la vieillesse »
Philippe Bouvard
« Les hommes sont comme les vins : lorsqu'ils deviennent meilleurs en vieillissant, c'est
qu'ils sont d'une très grande qualité. » Philippe Bouvard
« Le pire con, c'est le vieux con, on ne peut rien contre l'expérience » Jacob Braude
« Les vieux ne meurent pas, ils s'endorment un jour et dorment trop longtemps » Jacques Brel
« Mourir, cela n'est rien. Mourir, la belle affaire ! Mais vieillir...... » Jacques Brel
« L'âge ne compte pas, à moins d'être un fromage » Billie Burke
« Le traître, ce n'est pas l'âge, c'est la maladie » Robert Butler
« Mes amis, mes jeunes amis, en 2005, nous fêterons mon centenaire...... si, bien sûr, vous êtes encore là »
Léo Campion
« La jeunesse a le privilège du bénéfice du doute. Éventuellement, un jeune con peut s'améliorer.
Un vieux con, c'est foutu. » Léo Campion
« Vieillir, c'est passe de la passion à la compassion. » Albert Camus
« Ce qu'on appelait autrefois l'âge mûr tend à disparaître. On reste jeune très longtemps, puis on devient gâteux. »
Alfred Capus
« Dans l'âge mûr, on peut encore recevoir dans ses bras une femme qui tombe, mais on ne peut plus
la faire tomber soi-même » Alfred Capus
« Vieux, moi ? Je peux encore faire l'amour deux fois de suite. Une fois l'hiver, une fois l'été. » Alfred Capus
« On ne sait pas de quoi il est mort. On ne savait pas déjà de quoi il vivait. » Alfred Capus
« On est toujours le jeune d'un vieux et le vieux d'un jeune » Alexandre Carlson
« L'être humain semble le seul animal susceptible de sauter une génération par le bas pour s'occuper du
petit de son petit ( le petit-enfant ) et une génération par le haut pour s'occuper du grand de son grand
( le grand-parent ) »Alexandre Carlson
« On a l'âge de ses artères » Eugène Casalis
« Une famille sans grand-père et sans grand-mère, ce serait comme une grande maison sans grenier »
Gilbert Cesbron
« On est jeune tant qu'on souhaite que chaque jour diffère de la veille; vieux quand on espère que chaque
année ressemblera à la précédente » Gilbert Cesbron
« De violon, l'homme en vieillissant devient violoncelle, puis contrebasse : un corps épais, une voix grave
et pas grand chose à dire » Gilbert Cesbron
« C'est après l'âge des passions que les grands hommes ont produit leurs chefs-d'oeuvre, comme c'est
après les éruptions volcaniques que la terre est la plus fertile » Sébastien Chamfort
« On cesse d'être jeune au moment où, dans sa famille, on n'a plus personne devant soi » Sébastien Chamfort
« À l'heure de sa mort, alors que ses amis le suppliaient d'accepter les derniers sacrements dont il ne voulait pas :
"Je vais faire semblant de ne pas mourir." » Sébastien Chamfort
« Apprendre à mourir ! Et pourquoi donc ? On y réussit très bien la première fois. » Sébastien Chamfort
« Quel que soit votre âge, ne pas se sentir aimé, c'est se sentir repoussé » Coco Chanel
« Le gens de mon âge me paraissent plus âgés que moi » Maurice Chapelan
«Chaque âge a ses problèmes. On les résout à l'âge suivant » Maurice Chapelan
« Savoir vieillir est facile : on n'a plus l'embarras du choix » Maurice Chapelan
« L'enfant se laisse vivre, l'adolescent attend de vivre, l'homme essaie de vivre et le vieillard de survivre »
Maurice Chapelan
«En vain on me dit : "Vous rajeunissez" croit-on me faire prendre pour ma dent de lait ma dent
de sagesse » Chateaubriand
« A 70 ans, on a plus d'appétit, on dort d'un sommeil plus profond, on se sent plus en forme, il est visiblement meilleur pour la santé d'avoir des femmes dans la mémoire que sur les genoux » Maurice Chevalier
« L'âge mûr est le plus beau de tous. On est assez vieux pour reconnaître ses erreurs passées, mais encore assez jeune pour en commettre de nouvelles » Maurice Chevalier
« Après tout, ce n'est pas si désagréable que ça de vieillir quand on songe à l'autre éventualité » Maurice Chevalier
« Vieillir : c'est très mauvais signe quand on oublie de reboutonner sa braguette après avoir pissé,
mais c'est pire quand on oublie de la déboutonner avant » Maurice Chevalier
« Mon mari est archéologue. Plus je vieillis, plus je l'intéresse. » Agatha Christie
« Je dois ma longévité à deux choses, le whisky et le sport : le whisky, parce que j'en ai bu pas mal
et le sport parce que je n'en ai jamais fait ! » Winston Churchill
« Nul n'est si vieux qu'il ne croit pouvoir vivre un an de plus » Cicéron
« Les hommes ressemblent aux vins. L'âge aigrit les mauvais et améliore les bons » Cicéron

« La vieillesse, en définitive, n'est que la punition d'avoir vécu » Michel Cioran
« On cesse d'être jeune au moment où l'on ne choisit plus ses ennemis, où l'on se contente de ceux
qu'on a sous la main » Michel Cioran
« En vieillissant, on apprend à troquer ses erreurs contre ses ricanements. » Michel Cioran
« En vieillissant, on perd pas mal de ses défauts, ils ne nous servent plus à rien » Paul Claudel
« 80 ans : plus d'yeux, plus d'oreilles, plus de dents, plus de jambes, plus de souffle et,
c'est étonnant comme on s'en passe » Paul Claudel
« Quatre vingt ans c'est l'âge de la puberté académique » Paul Claudel
« Les femmes vivent plus longtemps que les hommes, surtout quand elles sont veuves » Georges Clemenceau
« Le temps, ce sculpteur, qui réussit parfois si bien les têtes de vieux » Nathalie Clifford-Barney
« La vieillesse commence quand on décide un jour de ne pas faire quelque chose, sous prétexte
qu'on l'a déjà fait » Jean Cocteau
« On peut naître vieux comme on peut mourir jeune » Jean Cocteau
« Avoir des petits-enfants ne signifie pas forcément qu'on soit vieux, mais cela veut dire qu'on est marié
avec une grand-mère » Norman Colie
« "Un chien a mordu une vieille dame" Vous vous rendez compte de la vie de ces pauvres
bêtes : être obligé de manger des vieux ! L'horreur ! » Coluche
« Toute la conception de l'existence peut être changée si l'on examine la vieillesse comme un aboutissement
non comme une fin » Alfred Cortot
« La mort n'est en définitive, que le résultat d'un défaut d'éducation puisqu'elle est
la conséquence d'un manque de savoir vivre » Pierre Dac
« C'est la gloire des vieilles gens que de prétendre toujours avoir été plus sage que ceux
qui sont venus après eux » Marie-thérèse d'Angoulème
« Brûlez de vieux bois, buvez de vieux vins, lisez de vieux livres, ayez de vieux amis » Alphonse XI d'Espagne
« La première qualité d'une femme, même âgée, c'est d'être jeune » Frédéric Dard
« Il y a des femmes qui savent vieillir, d'autres qui se savent pas se rajeunir » Frédéric Dard
« Tous les vieillards ont des choses intéressantes à dire, dommage qu'ils le disent avec leurs gencives » Frédéric Dard
« La Légion d'Honneur ? A partir d'un certain âge, il faut disposer d'un sacré piston pour ne pas l'avoir » Frédéric Dard
« Les hommes vieillissent, mais ne mûrissent pas » Alphonse Daudet
« Les jeunes s'illusionnent sur leur avenir; les vieillards sur leur passé. » Decoly
« Différence entre la jeunesse et la vieillesse : la première a quatre membres souple et un raide;
la seconde, quatre membres raides et un souple. » Jean Delacour
« Au Paradis, tu seras assis à la droite du Seigneur. C'est normal. C'est la place du mort.» Pierre Desproges
« La vieillesse, c'est, dans la vie d'un homme, l'époque où, quand il flirte, il ne peut plus se rappeler pourquoi »
Jacques Deval
« Mourir en beauté, c'est un luxe qu'on ne peut vraiment plus se permettre à partir d'un certain âge »
Roland Devaux
« Quelle que soit sa date de naissance, une femme n'a jamais que l'âge qu'elle paraît aux yeux de l'homme
qui prend plaisir à la regarder » Marlène Dietrich
« Il y a bien de la différence entre être un beau vieillard et avoir une belle vieillesse » Denis Diderot
« Voulez-vous savoir ce qui fait les bons mariages ? -- les sens dans la jeunesse -- l'habitude dans l'âge mûr
-- le besoin réciproque dans la vieillesse » Duc de Lévis
« Ce qu'il y a de triste, ce n'est pas d'être vieux, c'est de ne plus être jeune » Dumas fils
« La vieillesse n'est pas supportable sans un idéal ou un vice » Dumas fils
« La jeunesse est une courte erreur et la vieillesse un long regret » Henri Duvernois
« La sagesse de l'homme qui vieillit n'est-elle pas de se situer dans l'instant entre ce qui n'est plus possible
et ce qui l'est encore » Marcel Eck
« A 20 ans, je ne pensais qu'à aimer; à 75 ans je n'aime plus qu'à penser » Albert Einstein
« Il n'est qu'une manière de bien vieillir, c'est de mourir auparavant » Georges Elgozy
« Si la jeunesse est l'avenir de l'homme, la vieillesse en est la gardienne » Guy Ericx
« Les vieillards sont toujours assez jeune pour s'instruire » Eschyle
« A un certain âge, les deux bras d'un fauteuil vous attirent plus que les deux bras d'une femme » Gustave Flaubert
« Plusieurs femmes m'ont confié les affaires de leurs maisons, leurs amours ; aucune ne m'a jamais confié son âge.... »
Bernard de Fontenelle
« La vieillesse a beaucoup d'avantages. Lequel par exemple ? » Gene Fowler
« La vieillesse qui est une déchéance pour les êtres ordinaires est, pour les hommes de génie,
une apothéose » Anatole France
« Les femmes vertueuses vieillissent plus vite que les autres. » Anatole France
« Si vous arrivez à vous arrêter de fumer, boire et faire l'amour, vous ne vivrez pas plus vieux,
ça vous semblera juste plus long » Clément Freud
« Dans la circulation de la libido, il n'y a ni jeunes ni vieux : le désir n'a pas d'âge » Sigmund Freud
« Si tu veux pouvoir supporter la vie, soit prêt à accepter la mort. » Sigmund Freud
« Quand on se fait vieux, on se réveille chaque matin avec l'impression que le chauffage ne marche pas. »
Romain Gary
« Beaucoup de gens sont malades, quand ils sont vieux.... c'est triste..... D'un autre côté; ça les occupe »
Philippe Geluck
« Les jeunes gens disent : l'amour, l'argent et la santé. Un jour viendra où ils diront :
la santé, l'argent et l'amour » Paul Geraldy
« Les adolescents trop chastes font les vieillards dissolus » André Gide
« J'ai eu soixante ans pendant vingt ans, et , soudain, j'ai eu quatre-vingt ans » André Gide
« Quand je cesserai de m'indigner, j'aurai commencé ma vieillesse » André Gide
« Au contraire des piles Wonder, le vieux ne s'use que si l'on ne s'en sert pas» Guy Gilbert
« Faites défiler les vieillards d'un pays, et vous connaîtrez l'état de ses sports » Jean Giraudoux
« Faire attention à son âge est le signe même du vieillissement » Françoise Giroud
« La moitié du dictionnaire, c'est des mots pour les vieux. » Jean-Marie Gourio
« Chez les grands-parents âgés, la tendresse du cœur a remplacé la lumière des yeux » Léonce de Grandmaison
« La vieillesse est si longue qu'il ne faut pas la commencer trop tôt. » Benoîte Groult
« Les vieux faudrait les tuer dès la naissance. » Robert Guédiguian
« La vieillesse est une longue suite de défaites, une marche exténuante vers l'infirmité absolue de la mort »
Paul Guimard
«Dans la mort les plus à plaindre, sont ceux qui restent, dit-on. Bon, demandez-leur
donc de changer » Lucien Guitry
« Une vieille femme, ça ne peut pas être très bien - et une vieille dame, c'est si jolie ! » Sacha Guitry
« Il y a deux sortes de femmes : celles qui sont jeunes et jolies : et celles qui me trouvent encore bien »
Sacha Guitry
« Les vieillards et les oiseaux affrontent chaque année le même problème : passer l'hiver. » Sacha Guitry
« Elle était tellement paresseuse qu'elle ne faisait même pas son âge » Sacha Guitry
« J'ai soixante-deux ans, ce n'est pas mal pour un homme de mon âge » Sacha Guitry
« Les jeunes se font des amis; les vieux, eux, se font des ingrats. » Sacha Guitry
« J'ignore mon âge quand je ne me regarde pas dans la glace » Jean Guitton
« En Afrique, tout vieillard qui meurt est une bibliothèque qui se consume » Amadou-Hampate Ba
« La sagesse des vieillards, c'est une grande erreur, ce n'est pas plus sage qu'ils deviennent,
c'est plus prudents » Ernest Hemingway
« Maintenant que je suis vieux, quand je parcours un cimetière, j'ai l'impression de visiter des appartements »
Edouard Herriot
« Il est bon d'être ancien et mauvais d'être vieux » Victor Hugo
« L'homme sage mûrit et ne vieillit pas » Victor Hugo
« Les vieillards croient gémir sur leur temps, ils ne gémissent que sur leur âge » Victor Hugo
« Un des privilèges de la vieillesse, c'est d'avoir outre son âge, tous les âges » Victor Hugo
« La vieillesse bien comprise est l'âge de l'espérance » Victor Hugo
« Je crois que la vieillesse arrive par les yeux et qu'on vieillit plus vite à voir toujours des vieux » Victor Hugo
« La misère d'un enfant intéresse une mère; la misère d'un jeune homme intéresse une jeune fille; la misère d'un vieillard n'intéresse personne » Victor Hugo
« 40 ans c'est la vieillesse de la jeunesse, mais 50 ans c'est la jeunesse de la vieillesse » Victor Hugo
« A 20 ans, on est plus amoureux qu'autre chose; à 60 ans on est plus autre chose qu'amoureux. » Victor Hugo
« Les statistiques prouvent que le vieillard meurt beaucoup plus souvent dans son lit que sur la route :
pour le vieillard, le lit, voilà l'ennemi. » Robert Hugonot
« Chaque fois qu'un ami vous complimente sur votre jeunesse, vous pouvez être certain qu'il trouve
que vous avez vieilli. » John Irving
« L'habitude nous tue avant l'âge » Pascal Jardin
« Les vieux perdent l'orgueil en chemin; c'est vrai que c'est inutile la fierté » Claude Jasmin
« Pour vivre heureuse et toujours semblable à elle-même, une jolie femme doit mourir jeune
et une honnête femme mourir âgée. » Joseph Joubert
« Il y a toujours une certaine tension entre l'âge qu'on a, qu'on paraît, qu'on se donne et qu'on vous donne »
Marcel Jouhandeau
« Vieillir, ce n'est pas du tout ce que l'on croit; ce n'est pas diminuer, c'est grandir. » Marcel Jouhandeau
« La vieillesse apporte une lucidité dont la jeunesse est bien incapable et une sérénité
bien préférable à la passion » Marcel Jouhandeau
« Un jour vient où vous manque une seule chose et, ce n'est pas l'objet de votre désir, c'est le désir. »
Marcel Jouhandeau
« Les vieillards, il faudrait les tuer jeunes ! » Alfred Jarry
« Mon rêve : mourir jeune à un âge très avancé » Henri Jeanson
« La vie est un compte de faits. » Henri Jeanson
« Ces vieillards qui courent après leur jeunesse, et qui n'attrapent qu'un chaud et froid » Henri Jeanson
« Ne pas honorer la vieillesse, c'est démolir, le matin, la maison où on doit dormir le soir » Alphonse Karr
« Qu'on soit petit ou grand, c'est terrible d'être seul et d'avoir peur, vieux c'est pire encore. » Stephen King
« Il faut traiter doucement les vieilles gens. Elles ressemblent à des roses fanées qui s'effeuillent
au moindre contact » Selma Lagerlöf
« Les liaisons commencent dans le champagne et finissent dans la camomille » Valéry Larbaud
« Je suis dans la fleur d'un âge qui commence à sentir le chrysanthème » Robert Lassus
« C'est ça être vieux. C'est d'avoir un seul endroit où aller, et d'être obligé d'y aller » Christine Latour
« J'ai souvent pensé que le plus sûr moyen de se rajeunir dans la vieillesse était,
sans attendre d'en être là, de se vieillir dès la jeunesse » Henri Lavedan
« On peut dire tout ce qu'on voudra sur la vieillesse. Ca vaut mieux que d'être mort. » Stephen Leacock
« Ce qu'il est difficile de devenir octogénaire ! Après il n'y a plus qu'à se laisser vivre. » Paul Léautaud
« Je m'amuse à vieillir. C'est une occupation de tous les instants. » Paul Leautaud
« Premier jour de ma 69ème année. Un chiffre bien agréable en amour.
Fichue affaire pour l'âge. » Paul Léautaud
« Si Dieu m'avait fait l'honneur de me consulter, je lui aurais conseillé de placer les rides des femmes
sous le talon. » Ninon de Lenclos
« Ce qu'il y a de bien quand on devient vieux, c'est que toutes ces choses que vous n'avez pu avoir
quand vous étiez jeune, vous n'en avez plus envie. » L. Mac Candless
« Souriez, Mesdames, afin que, plus tard, vos rides soient bien placées » Françoise Maintenon ( Madame de)
« La grande majorité des personnes choisit de rester à domicile, et on n'a jamais entendu un vieux dire :
" C'est chouette, l'année prochaine j'entre en maison de retraite "» Jean Maisondieu
« La vieillesse est un crime puni d'exclusion » Jean Maisondieu
« Éviter la mort de l'esprit n'est envisageable qu'en acceptant d'avoir la mort
présente à l'esprit» Jean Maisondieu
« On ne voit vieillir que les autres » André Malraux
« La vieillesse est un aveu de la vie d'avant » André Malraux
« On ne peut s'empêcher de vieillir, mais on peut s'empêcher de devenir vieux » Henri Matisse
« La vieillesse est un âge heureux, dommage qu'elle finisse mal » François Mauriac
« Un vieillard endormi, on dirait la répétition générale de l'attaque qui l'emportera » François Mauriac
« Deux vieux époux ne se détestent jamais complètement. » François Mauriac
«Ce n'est pas parce qu'on a un pied dans la tombe, qu'il faut se laisser marcher sur l'autre » François Mauriac
« Les gouvernements ont l'âge de leurs finances comme les hommes ont l'âge de leurs artères » André Maurois
« L'art de vieillir, c'est d'apparaître aux générations qui suivent comme un appui et non comme un obstacle,
comme un confident et non comme un rival » André Maurois
« C'est avec des adolescents qui durent un certain nombre d'années que la vie fait des vieillards » André Maurois
« C'est au moment où nos forces diminuent de moitié que nos années comptent double. » Tristan Maya
« Il n'y a point de vieilles femmes. Toute, à tout âge, si elle aime, si elle est bonne, donne à l'homme
le moment de l'infini » Jules Michelet
« Si l'expérience servait à quelque chose, à partir d'un certain âge, on ne devrait plus s'enrhumer »
Charles Mollaret
« Il ne se voit point d'âmes, ou fort rares, qui en vieillissant ne sentent l'aigre et le moisi. » Montaigne
« La vieillesse nous attache plus de rides en l'esprit qu'au visage » Montaigne
« C'est un malheur qu'il y a trop peu d'intervalle entre le temps où l'on est trop jeune, et le temps
où l'on est trop vieux » Montesquieu
« Les vieillards meurent parce qu'ils ne sont plus aimés » Henri de Montherlant
« Les enfants martyrs sont ceux qu'on embrasse trop. Les grand-mères sont particulièrement recherchées
pour cette tâche de tortionnaire. » Henri de Montherlant
« La vieillesse vit sous le signe moins : on est de moins en moins intelligent, de moins en moins bête »
Paul Morand
« L'âge ne vous protège pas des dangers de l'amour. Mais l'amour, dans une certaine mesure,
vous protège des dangers de l'âge. » Jeanne Moreau
« A un certain âge, il ne faut plus chercher à plaire, il faut chercher à ne pas déplaire » Marguerite Moreno
« Les cheveux blancs ne font pas la vieillesse et le cœur de l'homme n'a pas d'âge » Alfred de Musset
« Quand un homme est jeune, il a de l'estomac ; quand il l'est moins, il a du ventre » Noctuel
« La jeunesse veut l'espace; la vieillesse le temps » Jean Nohain
« Être vieux, c'est quand on tutoie tout le monde et que personne ne vous dit "tu" » Marcel Pagnol
« La mort, c'est tellement obligatoire que c'est presque une formalité. » Marcel Pagnol
« La vieillesse n'est pas une question d'âge, mais bien plus une certaine façon de regarder les autres »
Alice Parizeau
« Trop de jeunesse et trop de vieillesse empêchent l'esprit » Blaise Pascal
« Les hommes n'ayant su guérir la mort, se sont avisés, pour se rendre heureux
de n'y point penser » Blaise Pascal
« La Mort ? Pourvu que je vive jusque-là. » Jean Paulhan
« Quand on vieillit, le pire ce n'est pas d'être moins désirable, c'est de ne plus désirer » Louis Pauwels
« Il y a quelque chose de plus triste que de vieillir, c'est de rester enfant » César Pavese
« Une vieille fille, c'est une jeune fille qui a dit non une fois de trop » Peynet
« La jeunesse ne raisonne pas, elle agit, le vieillard raisonne et voudrait faire agir les autres à sa place »
Francis Picabia
« La vieillesse est l'âge où les hommes s'occupent davantage de la nourriture que de la serveuse,
même si elle est jolie » René Pichon
« Les grands-mères tricotent des souvenirs » Piem
« Dès l'instant où l'on cesse de respecter l'ultime parcelle d'une seule vie, n'est-on pas entraîné infailliblement
sur la pente qui conduit à les mépriser toutes ? » L. Portes
« C'est avec des adolescents qui durent un assez grand nombre d'années que la vie fait
ses vieillards. » Marcel Proust
« La jeunesse ressemble à tout ce qui s'accroît, la vieillesse à tout ce qui décroît » Pythagore
« Quand quelqu'un prend sa retraite et que, dorénavant, il n'a plus d'horaire à respecter, ses amis,
généralement, lui offrent une montre » Sheriff R.C.
« Vieillir, c'est trois choses : la première, c'est perdre la mémoire ; les deux autres, je ne m'en souviens plus »
Ronald Reagan
« Pouvoir oublier est le secret de l'éternelle jeunesse. Nous devenons vieux par le souvenir. »
Erich Maria Remarque
« Quand on se réjouit d'être jeune, et qu'on remarque qu'on se porte bien, c'est la vieillesse » Jules Renard
« La vieillesse arrive brusquement comme la neige. Un matin, au réveil, on s'aperçoit que tout est blanc »
Jules Renard
« Il est si vieux qu'il ne sort de sa bouche que des mots qui ont l'air historique » Jules Renard
« La vieillesse, c'est quand on commence à dire : " Je ne me suis jamais senti aussi jeune ! " » Jules Renard
« Elle croit que l'âge c'est de l'argent, et elle économise sur son âge » Jules Renard
« La vieillesse, c'est l'époque de notre vie où notre tombe se place près de notre berceau » Johann Richter
« La différence entre les jeunes et les vieux, c'est que les vieux ont beaucoup plus de souvenirs,
et beaucoup moins de mémoire » Paul Ricoeur
« Le temps, c'est de l'argent. Sur nos cheveux » Henri Rochefort
« L'enfer des femmes c'est la vieillesse. » François de la Rochefoucauld
« Les défauts de l'esprit augmentent, en vieillissant, comme ceux du visage » François de la Rochefoucauld
« En vieillissant, on devient plus fou ou plus sage. » François de la Rochefoucauld
« Les vieillards aiment à donner de bons préceptes pour se consoler de n'être plus en état
de donner de mauvais exemples » François de la Rochefoucauld
« Jeune, on est riche de tout l'avenir qu'on rêve, vieux, on est pauvre de tout le passé qu'on regrette »
P. Rochepèdre
« Si le bourgeois a tendance à surestimer la vieillesse, l'antibourgeois tend plutôt à surestimer la jeunesse »
Karl Anton von Rohan
« On ne peut s'empêcher de vieillir, mais on n'est pas obligé de vivre en vieux. » Joseph Rony
« Les parents âgés sont les enfants que l'on a sur le tard » Catherine Roos
«À vingt ans j'avais la peau lisse et une robe plissée, à présent j'ai une robe lisse et la peau plissée ! »
Françoise Rosay
« Le vieillissement est d'autant plus actif que l'être est plus jeune. Ce qui vieillit le moins, c'est le vieillard »
Jean Rostand
« Quand j'étais jeune, je plaignais les vieux. Maintenant que je suis vieux, ce sont les jeunes que je plains »
Jean Rostand
« J'ai décidé de ne plus jouer, non parce que je ne trouve plus les notes, mais parce que je ne trouve plus le piano » Arthur Rubinstein
« La vieillesse, c'est le temps où les anniversaires ne sont plus des fêtes » Robert Sabatier
« Vieillir : c'est jusqu'ici le seul moyen connu de ne pas mourir. » Sainte-Beuve
« Le temps est injuste : Avec l'âge les hommes mûrissent, les femmes vieillissent » Cyril Salvador
« Un jeune homme qui n'a pas pleuré est un sauvage et un vieillard qui ne rit pas est un insensé » Georges Santayana
« On est vieux quand on ne regrette plus d'être mortel » Henri Sarn
« Quand on est vieux, il est courtois, voire charitable, d'ôter ses lunettes pour regarder sa femme » Henri Sarn
« On traverse des orages pour voir sa fiancée, mais une goutte de pluie suffit pour remettre
une visite à sa grand-mère » Henri Sarn
« Dans l'âge mûr, on s'entend mieux à se garder contre le malheur, dans la jeunesse à le supporter » Arthur Schopenhauer
« Mon grand-père est mort, mon père est mort, je crains que ce ne soit héréditaire » Georges Bernard Shaw
« Il y a des gens qui sont nés pour être vieux, et n'ont de cesse qu'ils le soient devenus réellement » Jean Simard
« Être vieux, c'est quand vous connaissez toutes les réponses et qu'on ne vous pose plus de questions » Bert Kruger Smith
« Les yeux de l'esprit deviennent plus perçants à l'âge où les yeux du corps s'affaiblissent » Socrate
« La vieillesse n'est pas autre chose que l'absence d'illusion et de passion » Henri Stendhal
« Tout jeune on pousse. Adulte, on se pousse. Vieux, les autres vous poussent. » Jacques Sternberg
« Tu es laid, sois terrible, on oubliera ta laideur. Tu es vieux, sois énergique, on oubliera ton âge » Eugène Sue
« Si la jeunesse est la plus belle des fleurs, la vieillesse est le plus savoureux des fruits » Sophie Swetchine
« Tout le monde voudrait vivre longtemps, mais personne ne voudrait être vieux » Jonathan Swift
« Jamais homme sage, n'a souhaité rajeunir. » Jonathan Swift
« Quand on est vieux, chaque jour a valeur d'éternité. » Françoise Tessier-Dumoulin
« Chaque homme porte en lui l'enfant qu'il a été et le vieillard qu'il sera un jour » Antoine Thomas
« Quand on se regarde plus dans ses souvenirs que dans son miroir, c'est qu'on se fait bien vieux ! » Jérôme Touzalin
« A 80 ans, on n'a pas de temps à perdre. On a plutôt du temps à tuer. » Janik Tremblay
« Lit : C'est l'endroit le plus dangereux du monde. 80% des gens y meurent. » Mark Twain
« La vieillesse, c'est quand on se sent dépassé par des idées qui vous semblent nouvelles » Victor Vasarely
« Dis-moi comment tu traites tes vieux, je te dirai quel avenir tu te prépares » Pierre Vellas
« Le cœur ne vieillit pas, mais il est triste de loger dans des ruines » Voltaire
« Les femmes ressemblent aux girouettes, elles se fixent quand elles se rouillent » Voltaire
« Qui n'a pas l'esprit se son âge, de son âge a tous les malheur » Voltaire
« Dans ta jeunesse fait l'amour et ton salut dans ta vieillesse » Voltaire
« Il n'y a rien de plus ridicule qu'un médecin qui ne meurt pas de vieillesse » Voltaire
«" Je perd mes dents. Je meurs en détail "» Voltaire
« La vieillesse est la seule maladie dont on n'attend pas la guérison » Orson Welles
« Si l'on veut retrouver sa jeunesse, il suffit d'en répéter les erreurs. » Oscar Wilde
« Une femme met 45 ans pour arriver à la trentaine » Oscar Wilde
« Les jeunes hommes voudraient être fidèles et ne le sont pas. Les vieux voudraient être infidèles et ne le peuvent pas » Oscar Wilde
« Je n'ai pas peur de la mort. Ce qui me terrifie c'est l'approche de la mort. » Oscar Wilde
« Il ne faut jamais oublier que les gens âgés ont besoin de bien peu de choses, mais de ce peu là,
ils en ont terriblement besoin » Margaret Willour
« Une mère devient vraiment une grand'mère le jour où elle cesse de voir les défauts de ses enfants tant elle est en admiration devant les qualités de ses petits-enfants » Lois Wyse
« Il faut faire des enfants quand on est vieux, parce qu'on les emmerde pas longtemps » Jean Yanne

Mes regrets

Maintenant je pardonne à la douce fureur
Qui m'a fait consumer le meilleur de mon âge,
Sans tirer aucun fruit de mon ingrat ouvrage,
Que le vain passetemps d'une si longue erreur.

Maintenant je pardonne à ce plaisant labeur,
Puisque seul il endort le souci qui m'outrage,
Et puisque seul il fait qu'au milieu de l'orage,
Ainsi qu'auparavant, je ne tremble de peur.

Si les vers ont été l'abus de ma jeunesse,
Les vers seront aussi l'appui de ma vieillesse :
S'ils furent ma folie, ils seront ma raison

S'ils furent ma blessure, ils seront mon Achille,
S'ils furent mon venin, le scorpion utile
Qui sera de mon mal la seule guérison.


Joachim du Bellay

Sonnet pour Hélène

SONNET pour HELENE II , 43

Quand vous serez bien vieille, au soir, à la chandelle,
Assise auprès du feu, dévidant et filant,
Direz, chantant mes vers, en vous émerveillant :
Ronsard me célébrait du temps que j'étais belle.

Lors vous n'aurez servante oyant telle nouvelle,
Déjà sous le labeur à demi sommeillant,
Qui au bruit de mon nom ne s'aille réveillant,
Bénissant votre nom de louanges immortelle.

Je serai sous la terre et, fantôme sans os,
Par les ombres myrteux je prendrai mon repos ;
Vous serez au foyer une vieille accroupie,

Regrettant mon amour et votre fier dédain.
Vivez, si m'en croyez, n'attendez à demain ;
Cueillez dès aujourd'hui les roses de la vie.

Pierre de Ronsard

La jeunesse

La jeunesse n'est pas une période de la vie,
elle est un état d'esprit, un effet de la volonté,
une qualité de l'imagination, une intensité émotive,
une victoire du courage sur la timidité,
du goût de l'aventure sur l'amour du confort.
On ne devient pas vieux pour avoir vécu un certain nombre d'années :
on devient vieux parce qu'on a déserté son idéal.
Les années rident la peau ; renoncer à son idéal ride l'âme.
Les préoccupations, les doutes, les craintes et les désespoirs
sont les ennemis qui, lentement, nous font pencher vers la terre
et devenir poussière avant la mort.
Jeune est celui qui s'étonne et s'émerveille. Il demande
comme l'enfant insatiable : Et après ? Il défie les événements
et trouve de la joie au jeu de la vie.
Vous êtes aussi jeune que votre foi. Aussi vieux que votre doute.
Aussi jeune que votre confiance en vous-même.
Aussi jeune que votre espoir. Aussi vieux que votre abattement.
Vous resterez jeune tant que vous resterez réceptif.
Réceptif à ce qui est beau, bon et grand. Réceptif aux messages
de la nature, de l'homme et de l'infini.
Si un jour, votre cœur allait être mordu par le pessimisme
et rongé par le cynisme, puisse Dieu avoir pitié de votre âme de vieillard.

Samuel ULLMAN, 1870 à Birmingham (ALABAMA - USA) traduit en français par le Général Mac ARTHUR

La vieille femme grincheuse

QUE VOIS-TU, TOI QUI ME SOIGNES, QUE VOIS-TU ?
QUAND TU ME REGARDES, QUE PENSES-TU ?

Une vieille femme grincheuse, un peu folle
Le regard perdu, qui n'y est plus tout à fait,
Qui bave quand elle mange et ne répond jamais,
Qui, quand tu dis d'une voix forte "essayez"
Semble ne prêter aucune attention à ce que tu fais
Et ne cesse de perdre ses chaussures et ses bas,
Qui docile ou non, te laisse faire à ta guise,
Le bain et les repas pour occuper la longue journée grise.
C'est ça que tu penses, c'est ça que tu vois ?
Alors ouvre les yeux, ce n'est pas moi.
Je vais te dire qui je suis, assise là si tranquille
Me déplaçant à ton ordre, mangeant quand tu veux :
Je suis la dernière de dix, avec un père et une mère,
Des frères et des soeurs qui s'aiment entre eux.
Une jeune fille de 16 ans, des ailes aux pieds,
Rêvant que bientôt, elle rencontrera un fiancé.
Mariée déjà à 20 ans. Mon coeur bondit de joie
Au souvenir des voeux que j'ai fait ce jour-la.
J'ai 25 ans maintenant et un enfant à moi
Qui a besoin de moi pour lui construire une maison.
Une femme de trente ans, mon enfant grandit vite,
Nous sommes liés l'un a l'autre par des liens qui dureront.
Quarante ans, bientôt il ne sera plus là.
Mais mon homme est à mes côtes qui veille sur moi.
Cinquante ans, à nouveau jouent autour de moi des bébés ;
Me revoilà avec des enfants, moi et mon bien-aimé.
Voici les jours noirs, mon mari meurt.
Je regarde vers le futur en frémissant de peur,
Car mes enfants sont tous occupés à élever les leurs,
Et je pense aux années et à l'amour que J'ai connus.
Je suis vieille maintenant, et la nature est cruelle,
qui s'amuse a faire passer la vieillesse pour folle,
Mon corps s'en va, la grâce et la force m'abandonnent.
Et il y a maintenant une pierre la ou jadis j'eus un coeur.
Mais dans cette vieille carcasse, la jeune fille demeure
Dont le vieux coeur se gonfle sans relâche.
Je me souviens des joies, je me souviens des peines,
Et à nouveau je sens ma vie et j'aime.
Je repense aux années trop courtes et trop vite passées,
Et accepte cette réalité implacable que rien ne peut durer
Alors ouvre les yeux, toi qui me soignes et regarde.
Non la vieille femme grincheuse... regarde mieux, tu me verras !

Ce poème a été retrouvé dans les affaires d'une vieille dame Irlandaise après sa mort.

Recueillement

Tu réclamais le Soir ; il descend ; le voici :
Une atmosphère obscure enveloppe la ville,
Aux uns portant la paix, aux autres le souci

Charles Baudelaire. Recueillement

La chanson des vieux amants

Et plus le temps nous fait cortège
Et plus le temps nous fait tourment
Mais n'est-ce pas le pire piège
Que vivre en paix pour des amants
Bien sûr tu pleures un peu moins tôt
Je me déchire un peu plus tard
Nous protégeons moins nos mystères
On laisse moins faire le hasard
On se méfie du fil de l'eau
Mais c'est toujours la tendre guerre

Jacques Brel . La chanson des vieux amants

La vie n'a pas d'âge

La vie n'a pas d'âge
La vie n'a pas d'âge.
La vraie jeunesse ne s'use pas.
On a beau l'appeler souvenir,
On a beau dire qu'elle disparaît,
On a beau dire et vouloir dire que tout s'en va,
Tout ce qui est vrai reste là.
Quand la vérité est laide, c'est une bien fâcheuse histoire,
Quand la vérité est belle, rien ne ternit son miroir.
Les gens très âgés remontent en enfance
Et leur coeur bat
Là ou il n'y a pas d'autrefois.

Jacques Prévert

Touche

Touche...
Touche une herbe,
Touche une fleur,
Touche un fruit,
Touche un arbre et sa peau rugueuse,
Touche un caillou chauffé par le soleil,
Touche une bûche prête à se consumer pour te réchauffer.
Touche un petit oiseau, blotti avec confiance au creux de ta main,
laisse-toi imprégner par sa douceur, par le moment qui passe,
par l'air que tu respires, par la chaleur du soleil.
Touche une main, elle te raconte une histoire,
Touche un pied, et sens le chemin parcouru,
Touche une jambe, un corps et permets lui de te rencontrer,
tu rencontreras son âme.
Touche un corps qui s'abandonne, et tu te laisses aller aussi
dans cette confiance, dans le respect de l'autre,
tu accueilles l'autre en toi, comme lui te reçoit.
Touche, Touche, Touche, la vie est là, passant par ton coeur
pour aller jusqu'au bout de tes doigts.
Touche, Donne, Reçois
et entre dans cette dimension qui t'emmène vers l'infini.


Monique Wauqiez (70 ans), après un stage de réhabilitation du toucher

Habitude

Le seul danger serait en effet de se réveiller un jour
Avec une âme qui n'aurait jamais servi,
Une âme ensevelie de précautions,
Soigneusement amidonnée,
Repassée et pliée en quatre,
Mais qui tombe en poussière faute d'usage.
Car ce qu'il y a de pire,
C'est d'avoir une âme habituée,
Une âme tellement encroûtée,
Tellement imperméabilisée,
Que la grâce roule sur elle sans rien mouiller,
Comme des gouttes d'eau sur la toile cirée.


P. Baudiquey, Pleins signes

Être en relation...

Je veux t'aimer sans m'agripper,
t'apprécier sans te juger,
te rejoindre sans t'envahir,
t'inviter sans insistance,
te laisser sans culpabilité,
te critiquer sans te blâmer,
t'aider sans te diminuer.
Si tu veux bien m'accorder la même chose,
alors nous pourrons vraiment nous rencontrer
et nous enrichir l'un l'autre.

V. Satir

Les vieux

Les vieux ne parlent plus ou alors seulement parfois du bout des yeux
Même riches ils sont pauvres, ils n'ont plus d'illusions et n'ont qu'un coeur pour deux.
Chez eux ça sent le thym, le propre, la lavande et le verbe d'antan
Que l'on vive à Paris on vit tous en province quand on vit trop longtemps
Est-ce d'avoir trop ri que leur voix se lézarde quand ils parlent d'hier
Et d'avoir trop pleuré que des larmes encore leur perlent aux paupières
Et s'ils tremblent un peu est-ce de voir vieillir la pendule d'argent
Qui ronronne au salon, qui dit oui qui dit non, qui dit : je vous attends

Les vieux ne rêvent p!us, leurs livres s'ensommeillent, leurs pianos sont fermés
Le petit chat est mort, le muscat du dimanche ne les fait plus chanter
Les vieux ne bougent plus, leurs gestes ont trop de rides, leur monde est trop petit
Du lit à la fenêtre, puis du lit au fauteuil et puis du lit au lit
Et s'ils sortent encore, bras dessus bras dessous, tout habillés de raide
C'est pour suivre au soleil l'enterrement d'un plus vieux, l'enterrement d'une plus laide
Et le temps d'un sanglot, oublier toute une heure la pendule d'argent
Qui ronronne au salon, qui dit oui qui dit non, et puis qui les attend

Les vieux ne meurent pas, ils s'endorment un jour et dorment trop longtemps
Ils se tiennent la main, ils ont peur de se perdre et se perdent pourtant
Et l'autre reste là, le meilleur ou le pire, le doux ou le sévère
Cela n'importe pas, celui des deux qui reste se retrouve en enfer
Vous le verrez peut-être, vous la verrez parfois en pluie et en chagrin
Traverser le présent en s'excusant déjà de n'être pas plus loin
Et fuir devant vous une dernière fois la pendule d'argent
Qui ronronne au salon, qui dit oui qui dit non, qui leur dit : je t'attends
Qui ronronne au salon, qui dit oui qui dit non et puis qui nous attend

Jacques Brel - 1963

Bivalence

« La patiente est incapable de parler ni de comprendre le moindre mot. Il lui arrive parfois de proférer des sons inarticulés et incohérents durant des heures. Elle n'a aucun sens des personnes, des lieux et du temps. Elle réagit cependant à l'énoncé de son propre nom.
Il y a six mois que je m'occupe d'elle, mais elle montre toujours une totale indifférence à son aspect physique et ne fait aucun effort pour aider aux soins qu'on lui donne.
Il faut la laver, l'habiller, lui donner à manger. Comme elle n'a pas de dents, il faut lui écraser ses aliments. Elle bave sans arrêt de sorte que, devant, sa chemise est presque toujours sale.
Elle ne peut pas marcher.
Ses heures de sommeil sont totalement irrégulières. Elle s'éveille souvent au milieu de la nuit et réveille son entourage par ses cris.
La plupart du temps elle est gentille et de bonne humeur, mais plusieurs fois par jour, elle s'agite sans cause apparente, se met à pleurer et ne cesse de crier que si quelqu'un vient la consoler.
C'est par la description de ce cas clinique que je commençai un jour une conférence à des infirmières déjà diplômées, sur "les aspects physiques du vieillissement".
Je leur demandais ensuite quels sentiments elles éprouveraient à s'occuper de cette patiente. Les mots qui revinrent les plus souvent dans leurs réponses furent : désespérant, déprimant, pénible.
Je leur déclarai alors que j'avais grand plaisir à soigner cette personne et qu'elles en auraient autant que moi
Devant leur regard incrédule, je fis passer à la ronde une photo, celle de mon bébé de six mois.
Pourquoi est-il donc tellement plus difficile de s'occuper d'une femme de quatre-vingt-dix ans que d'un nourrisson ?
À l'évidence, ce n'est pas seulement une question de poids. La raison en est plus profonde.
Le bébé, et sur ce point toutes les infirmière furent d'accord avec moi, représente l'espoir et des possibilités quasiment infinies.
N'y aurait-il pas lieu de changer d'attitude, afin de donner à ceux qui achèvent leur vie dans l'impuissance de la vieillesse les mêmes soins qu'à ceux qui la commencent ? »

Dr Paul E. Ruskin, Journal of American Medical Association, 1984.

When I am an old woman

"En tant que vieux, je me supporte, mais je ne supporte pas les vieux - les autres vieux."
Cioran

Avertissement:
Quand je serai une vieille femme je m 'habillerai en violet,
Avec un chapeau rouge mal assorti et qui ne me va pas,
Et je gaspillerai ma pension à acheter du cognac ou des gants d'été
Et des sandales de satin, et je dirai que nous n'avons plus d'argent pour le beurre.
Je m'assiérai à même le trottoir quand je serai fatiguée
Et je me gorgerai de ces échantillons gratuits qu'on vous verse dans les magasins, et je tirerai les sonnettes d'alarme
Et je raclerai bruyamment les balustrades de fer des bâtiments publics avec ma canne
Et je compenserai pour toute la sobriété de ma jeunesse.
Je sortirai en pantoufles sous la pluie. Je cueillerai des fleurs dans les jardins des autres
Et j'apprendrai à cracher.Vous pouvez porter de hideuses chemises et devenir obèse
Et dévorer trois livres de saucisses d'un coup
Ou vivre de pain sec et de cornichons pendant une semaine
Et entasser plumes et crayons, et sous-verres à bière en carton et toutes sortes de choses encore dans des boîtes.
Mais pour le moment je dois porter des vêtements qui me tiennent au sec
Et payer notre loyer, et m'abstenir de jurer dans la rue Et donner le bon exemple aux
enfants. Nous devons inviter des amis à dîner, et lire les journaux. Mais peut-être devrais-je dès maintenant acquérir un peu de pratique?Ainsi les gens qui me connaissent ne seront pas trop surpris et choqués
Quand soudainement je serai vieille et commencerai à m 'habiller de violet.

(Waming :When 1 am an old woman 1 shaH wear purpleWith a red hat which doesn't go and doesn't suit me And 1 shaH spend my pension on brandy and summer glovesAnd satin sandals, and say we've no money for butter. 1 shaH sit down on the pavement when l'm tiredAnd gobble up samples in shops and press alarm bells And ram my stick along the public railingsAnd make up for the sobriety of my youth1 shaH go out in my slippers in the rainAnd pick the flowers in other people's gardens And leam to spit.You can wear terrible shirts and grow more fatAnd eat three pounds of sausages at a goOr only bread and pickle for a weekAnd hoard pens and pendIs and beermats and things in boxes.But now we must have clothes that keep us dryAnd pay our rent and not swear in the streetAnd set a good example for the children.We must have friends to dinner and read the papers. But maybe 1 ought to practice a little now ?So people who know me are not too shocked and surprised When suddenly 1 am old, and start to wear purple.)

Jenny Joseph

Désopilante lecture de ce poème de Jenny Joseph, méconnu chez nous mais très populaire en terres anglo-saxonnes où il fut deux fois nominé comme "poème le plus populaire de la seconde moitié du XXe siècle". Popularisé aux Etats-Uni, on le retrouve dans les années 80' sur d'innombrable calendriers, almanachs, supports de sagesse populaire.Il me fait considérer différemment cette vieille habillée comme un clown, ce vieux qui pisse entre deux voitures, ces deux octogénaires qui - bras dessus bras dessous - descendent du tram en chantant une chanson grivoise. Une certaine liberté serait-elle le privilège du grand âge?

L'homme s'endort

"Nombreuses fois
Nombre de fois
L' homme s'endort
Son corps l'éveille
Puis une fois
Rien qu'une fois
L'homme s'endort
Et perd son Corps.

René Char .

Toute passion abolie

En un éclair lady Slane sentit que le puzzle éclaté de ses souvenirs venait de se reconstituer, comme le font des notes de musique éparpillées qui prennent soudain forme et redeviennent cette mélodie familière que nous portons en nous. »

Vita Sackville-West (1892-1962), Toute passion abolie.

Je viens de fermer un roman merveilleux, histoire d’une vieille dame indigne, "adossée à la mort pour contempler la vie", qui constitue sans aucun doute un des plus beaux portraits de personne âgée que j'aie lu. L'intrigue est pourtant simplissime : le jour même de la mort de son mari Henry Holland, comte de Slane, lady Slane décide de vivre enfin sa vie. Elle a quatre vingt-huit ans et surprend son entourage en se retirant à Hampstead, dans une petite maison aperçue une seule fois, et aimée aussitôt, trente ans auparavant. Dans sa nouvelle demeure, toute passion abolie par l'âge et le choix du détachement - elle a pris soin de prévenir ses enfants: plus de visites familiales -, lady Slane se sent libre enfin de se souvenir et de rêver. Le reste dans le live pou ne pas déflorer votre plaisir.

Extrait.

« Soudain elle se souvint comment, avec Henry, lors d'une traversée du désert persan, leur voiture avait été escortée par une nuée de papillons blancs et jaunes qui dansaient parmi eux, à l'avant du convoi, puis autour d'eux, s'envolant parfois dans un vaste mouvement d'ensemble, revenant vers eux pour les entourer à nouveau, semblant prendre plaisir à exprimer leur frivolité par cette voltige harmonieuse autour du pesant chariot, mais incapables pourtant d'accorder leur vol à cette lenteur, et qui, pour apaiser leur impatience, repartaient en voletant très haut dans le ciel ou plongeaient entre les essieux, se glissant sous les voitures, s'en échappant avec grâce à l'instant même où, lourdement, les chevaux allaient poser leurs sabots; dessinant parfois de modestes taches d'ombre sur le sable, comme de petites ancres sombres, qui leur donnaient l'air d'être reliés soudain au sol par d'invisibles câbles, se laissant doucement entraîner avec la même légèreté capricieuse, semblant brusquement bercés par la progression monotone de la troupe qui, face au soleil, avançait de l'aube au crépuscule, comme une charrue qui creuserait son sillon tout droit vers la lumière, un unique et profond sillon qui semblait contourner le monde dans sa totalité - et elle se souvint alors avoir pensé que tout cela ressemblait à sa propre vie, que si Henry Holland était son soleil, le nuage de papillons représentait ses pensées les plus insolentes, ses rêves les plus fous, dansant dans la lumière sans jamais oser ni pouvoir ralentir la progression du convoi; ne touchant jamais le chariot de leurs ailes, voletant à perdre haleine, s'échappant, se lançant en avant, impertinents, envahissants, pour s'infiltrer à nouveau sous les essieux, illustrant toute une vie de liberté et de beauté, celle d'une bande de jeunes vagabonds insolents qui se contentaient d'effleurer la surface du désert et ses pesants chariots. Mais Henry qui commandait la mission se contentait de commenter: « C'est terrible, l'ophtalmie chez ces gens. Il faut faire quelque chose. » Et, sachant qu'il avait raison et que, dès leur arrivée, il en parlerait aux missionnaires, elle prenait soin d'oublier les papillons, et ne pensait plus qu'à son devoir. Dès qu'ils auraient atteint Yezd, Shiraz, ou une autre ville, elle établirait des programmes avec les épouses des missionnaires et s'occuperait de faire venir de l'acide borique d'Angleterre.
Mais par quelle étrange perversion, le vol léger des papillons était-il toujours demeuré le plus important? »


Sagesse du chagrin

"Dans ma jeunesse, je n'avais jamais connu le goût du chagrin
Mais je me plaisais à hanter de hauts balcons
Du haut desquels, pour écrire des poèmes nouveaux,
je me forçais à chanter d'imaginaires chagrins.
Aujourd'hui que j'ai bu le chagrin jusqu'à la lie
Je voudrais en parler, mais je me tais
Et si j'ouvre la bouche, c'est seulement pour dire:
«L'air est frais, quel bel automne! »


Xin Qiji (1140 - 1207, écrivain chinois)

Mystère de la peinture japonaise

"«Je dessine depuis l'âge de six ans toutes les formes qui me rencontrent. Quand j'ai eu cinquante ans, j'avais déjà publié des masses de dessins mais tout ce que j'ai fait avant soixantedix ans n'est pas digne d'être évoqué. A soixante-treize ans, j'ai commencé à saisir la vraie nature des bêtes, des arbres, des herbes, des oiseaux. A quatre-vingts ans, j'aurai fait des progrès. A quatre-vingt-dix ans, j'aurai peut-être approché le secret des choses. A cent ans, j'aurai atteint un grade de perfection qui touchera. Et à cent dix ans, tout ce que je dessinerai, ne serait-ce qu'un point ou une ligne, sera vivant. »

Hokusai Katsushika (1760-1849), peintre, dessinateur, graveur et auteur d'écrits populaires japonais. Ses derniers mots sont :
« Encore cinq ans et je serais devenu un grand artiste. »

Son âme aux cheveux gris

"Que chacun se rajeunisse
dépouille vite
son âme aux cheveux gris. "

Vladimir Maïakovski. Poésie . Gallimard."

La voix des choses

Le 3 octobre ou le 4, me trouvant à l'hôpital de Bangor, dans le Maine, où j'étais hospitalisée depuis deux jours, et ayant subi ce matin-là un angiogramme, Jerry Wilson, arrivé de Paris deux ou trois jours plus tôt pour me soigner, et lui-même malade, me mit entre les mains l'admirable plaque de malachite que j'avais marchandée à plusieurs reprises, en 1983 et 1985 à New Delhi, pour la lui offrir, et finalement donnée le 22 mars précédent, pour son anniversaire, quand il était lui-même hospitalisé dans le Maine. Elle ne l'avait pas quitté depuis.

Mais sans doute mes mains étaient faibles, ou moi-même un peu assoupie, car j'ai senti glisser quelque chose, un bruit léger, fatal, irréparable, me réveilla de mon sommeil.J' étais bouleversée d'avoir ainsi détruit à jamais cet objet qui avait tant compté pour nous, cette plaque de minéral au dessin parfait à peu près aussi antique que la terre. De quel dépôt cent fois millénaire était-elle venue pour nous attendre deux ans chez un bijoutier hindou, puis pour passer et repasser deux fois l'Atlantique, aux mains d'un ami qui n'avait peut-être plus longtemps à vivre? De quel Himalaya, de quel Pamir?

Mais le son même de sa fin avait été beau... «Oui, me dit-il, la voix des choses. » J' aurais voulu retourner en Inde pour lui retrouver une autre plaque aussi belle que celle-là. Mais j'ai décidé d'appeler La Voix des choses ce petit livre - où rien à peu près n'est de moi, sauf quelques traductions - mais qui m'a servi de livre de chevet et de livre de voyage pendant tant d'années et parfois de provision de courage.

Marguerite Yourcenar . Octobre 1985 - Juin 1987. La voix des choses . Éditions Gallimard, 1987.

L'eau prisonnière des secrets de mon coeur

'Mes pensées se sont peu à peu éloignées, mais ayant abordé un sentier
accueillant, je repousse les contrariétés tumultueuses et je m'arrête, les yeux
fermés, grisé par un parfum de passé que j'ai conservé, durant mon petit corps
à corps avec la vie. J'ai vécu hier, uniquement. Aujourd'hui a cette nudité qui
attend la chose désirée, ce cachet provisoire qui vieillit en nous sans amour.
Hier est un arbre aux longs branchages, à l'ombre duquel je suis allongé,
abandonné à la mémoire.

Soudain, je regarde, étonné: en longues caravanes, des voyageurs sont arrivés
dans le même sentier; les yeux endormis dans le souvenir, ils fredonnent des
chansons et évoquent ce qui fut. Et je crois deviner qu'ils se sont déplacés
pour s'arrêter, qu'ils ont parlé pour se taire, qu'ils ont ouvert leurs yeux
stupéfaits devant la fête des étoiles pour les fermer et revivre l'enallé...

Étendu dans ce nouveau chemin, avec les yeux avides et fleuris des jours
lointains, j'essaie vainement d'enrayer le fleuve du temps qui ondoie sur mes
faits et gestes. Mais l'eau que je parviens à recueillir reste prisonnière des
bassins secrets de mon coeur, dans lesquels, demain, devront s'enfoncer mes
veilles mains solitaires'.

Pablo Neruda. LE FLEUVE INVISIBLE, Premiers Poèmes "

J'ai vu des pots loquaces

"J'ai vu des pots loquaces
J'ai vu chez un potier,
dans de vastes espaces,
Deux milles pots,
les uns muets, d'autres loquaces
A son voisin un pot disait : Où sont allés
Le potier, l'acheteur et le vendeur rapaces? '

Omar Khayyam. Robaiyat."

Cela était si beau

"Vous, mes yeux bienheureux,
Ce que vous avez vu,
- Advienne que pourra -,
Cela était si beau."

Saint John Perse . Second Faust (acte V)

Mais rien non plus ne garde forme ni mesure, sous l’incessant afflux de l’être

« Que voulez-vous encore de moi, ô souffle originel ? (…)
Le vent nous conte sa vieillesse, le vent nous conte sa jeunesse… (…)
Et soudain tout m’est force et présence, où fume encore le thème du néant. »

Saint John Perse . Exil

Une seule et longue phrase

« Toujours il y eut cette clameur, toujours il y eut cette grandeur,
Cette chose errante par le monde, cette haute transe par le monde,
et sur toutes grèves de ce monde, du même souffle proférée,
la même vague proférant
Une seule et longue phrase sans césure à jamais inintelligible… »

Saint John Perse

Route de braise

"Grand âge, vous mentiez:
route de braise et non de cendre "

Saint John Perse . Chronique

Vers propoé par Madeleine Moulin pour intituler le réseau Braises de l'Institut de sociologie de l'ULB

Soleil de mars

Grisé par l'ardeur précoce du soleil
Un papillon jaune s'est mis à voltiger.
Assis auprès de la fenêtre, sommeille
Courbé dans son fauteuil un homme âgé.

Chantant sous les feuillages du printemps revenu,
Il a, jadis, abandonné ces lieux.
La poussière de tant de routes parcourues
A recouvert tous ses cheveux.

Certes l'arbre aux branches désormais fleuries
Les papillons parés d'un jaune nouveau
Nous semblent aujourd'hui à peine vieillis
Nous semblent aujourd'hui tout aussi beaux.

Et pourtant les arômes comme les couleurs
N'ont plus l'éclat d'avant, se font moins intenses.
La lumière aussi a perdu sa chaleur,
L'air est pénible à respirer et plus dense.

Comme l'abeille, le printemps murmure dou­cement
Ses chants multiples aux accents si gracieux.
Le ciel oscille entre le bleu, le blanc
Le papillon doré se fige peu à peu.

Hermann Hesse

Feuille morte

Toutes les fleurs veulent se changer en fruits,
Toute matinée veut devenir soirée,
Sur terre rien n'est éternité,
Si ce n'est le mouvement, le temps qui fuit.

Même le plus bel été veut voir une fois
La nature qui se fane, l'automne qui vient.
Reste tranquille, feuille, garde ton sang-froid
Lorsque le vent veut t'enlever au loin.

Poursuis tes jeux et ne te défends pas,
Laisse les choses advenir sans heurts,
Laisse enfin le vent qui te détacha
Te conduire jusqu'à ta demeure.


Hermann Hesse

Le pathos

Le pathos est une chose admirable qui sied souvent merveilleusement aux jeunes gens. Lorsqu'on est plus âgé, il convient davantage d'avoir de l'humour, de sourire, de ne pas prendre les choses au sérieux; il faut trans­former le spectacle du monde en un tableau, observer les choses comme s'il s'agissait des jeux furtifs des nuages dans le ciel du soir.

Prendre de l'âge ne signifie pas seulement se dégrader physiquement, se flétrir. Comme chaque étape de l'existence, la vieillesse a ses propres valeurs, une magie, une sagesse, des peines spécifiques. À!' époque où la culture était relativement florissante, on lui vouait avec rai­son une sorte de profond respect qui est aujour­d'hui revendiqué par la jeunesse. Nous ne voulons pas en tenir rigueur à cette dernière, mais nous n'avons pas envie non plus de croire ceux qui prétendent que les vieux ne valent rien.

Certes, le vieillissement est en lui-même un processus naturel; par ailleurs, un homme de soixante-cinq ou de soixante-quinze ans est aussi bien portant et normal qu'un homme de trente ou de cinquante ans, à condition qu'il ne cherche pas à paraître plus jeune. Cepen­dant, on n'est malheureusement pas toujours en accord avec son âge. Il arrive souvent qu'on soit intérieurement en avance sur lui, ou plus fréquemment encore qu'on retarde par rapport à lui - la conscience et le rapport à l'existence ont alors atteint une maturité moins grande que celle du corps, ils refusent d'intégrer les manifestations naturelles de l'âge et s'imposent des exigences qu'ils sont incapables de satisfaire.

Quand vient l'âge mûr, l'homme rajeunit. C'est ce qui m'arrive à présent, même si cela ne signifie pas grand-chose, puisque au fond mon rapport à l'existence n'a pas changé depuis mon enfance. Par ailleurs, j'ai toujours eu le sentiment qu'être adulte et vieillir s'ap­parentaient à une sorte de comédie.

Celui qui vieillit et prête attention à ce phé­nomène peut observer comment, malgré la disparition des forces vitales et de certaines facultés, une existence agrandit, multiplie chaque année le réseau infini de ses connexions, de ses entrelacements, et ce encore tardivement, jusqu'à la fin même. Il peut constater aussi que, tant que la mémoire veille, rien de ce qui se passe et de ce qui s'est passé ne se perd.
Hermann Hesse

Esquisse

Le vent froid de l'automne siffle dans les ajoncs desséchés
Qui blanchissent dans la lumière du soir ;
Les corneilles quittent les saules et volent vers l'intérieur des terres.
Un vieil homme se repose, seul sur la grève,
Il sent le vent dans ses cheveux, la nuit et la neige qui vient.
Depuis la rive plongée dans l'ombre il regarde vers la clarté,
Là-bas, entre nuages et lac, une bande
De terre éloignée brille encore dans la lumière chaude:
Au-delà merveilleux, règne de félicité comme le rêve et la poésie.
Il fixe du regard cette image lumineuse,
Repense à son pays, aux années de bonheur,
Voit pâlir l'or, le voit disparaître,
Se détourne, quitte les saules
Et marche lentement vers l'intérieur des terres


Hermann Hesse

L'homme de cinquante ans

De la naissance à l'enterrement,
L'existence dure cinquante ans,
Puis vient la mort qui fait son œuvre.
Notre esprit faible commence à s'étioler,
On n'est que déchéance et grossièreté
Nos cheveux tombent rapidement.
Même nos dents s'en vont,
Et au lieu de serrer avec bonheur
De belles jeunes fIlles sur nos cœurs,
C'est une œuvre de Goethe que nous lisons.

Mais une fois encore avant la fIn
Je veux prendre une de ces jeunettes;
Le regard vif, les cheveux décoiffés,
Doucement je la saisis dans mes mains,
J'embrasse sa bouche, ses seins, ses pom­mettes

J'ôte sa jupe, sa culotte ajustée.
Après, eh bien soit, j 'attendrai sans peine
Que la mort vienne m'emporter - Amen.

Hermann Hess

Les dix années

Les dix années qui séparent la quarantaine de la cinquantaine constituent toujours une
phase critique pour les hommes de tempéra­ment, les artistes. C'est une période d'inquié­tude et d'insatisfaction perpétuelles où l'on a souvent du mal à se sentir en accord avec son existence, avec soi-même. Mais ensuite vien­nent les années d'apaisement. J'en ai person­nellement fait l'expérience et je l'ai aussi observé chez bien d'autres gens. La jeunesse, le temps de l'effervescence et des combats res­tent merveilleux, mais la vieillesse et la matu­rité ont aussi leurs charmes et leurs bonheurs.

À cinquante ans, l'homme cesse peu à peu de s'adonner à des enfantillages, de vouloir acqué­rir réputation et respectabilité. Il commence àjeter un regard rétrospectif sur son existence, calmement, sans passion. Il apprend à attendre, il apprend à se taire, il apprend à écouter, et même si ces dons s'acquièrent au prix de quelques défauts, de quelques faiblesses, il considère ce sacrifIce comme un gain.

Hermann Hess

Devenir vieux

Ces choses futiles que la jeunesse prise,
Je les ai moi aussi bien longtemps vénérées,
Les boucles, cravates, les casques et épées,
Et puis surtout les petites femmes bien mises.

À présent seulement je comprends clairement,
Maintenant que pour moi, le vieux gamin chenu,
Toutes ces choses-là sont bel et bien perdues.
À présent seulement je comprends clairement
Combien étaient sages ces désirs d'antan.

Les rubans dans les cheveux, les bouclettes,
Et cet enchantement bientôt disparaîtront;
Mais ce qu'au cours de l'existence j'ai acquis,
La sagesse, la vertu, les bonnes chaussettes,
Sera pour mon malheur bien vite enfui;
Alors les grands froids sur la terre régneront.

Comme il est merveilleux pour les vieilles gens
De goûter un bourgogne auprès du feu
Et de partir enfin sans adieux douloureux ­
Mais pas encore, un peu plus tard, pas maintenant!

Hermann Hesse

Fin d'été

Au plus fort de l'été, le temps fut beau et radieux ici, dans le sud des Alpes, mais depuis deux semaines j'éprouve chaque jour la crainte secrète que cette saison ne se termine, crainte qui constitue, je le sais bien, le complément et l'intense saveur cachée de la Beauté. Par-dessus tout, je me suis mis à redouter le moindre petit signe annonciateur d'orage, car, à partir de la mi-août, chacun d'eux peut facilement dégénérer, durer des jours entiers, et dès lors c'en est fini de l'été, même si le temps se rétablit. Ici, dans le Sud, il est presque de règle que le plein été soit interrompu par un orage de la sorte, qu'il s'éteigne et meure rapidement après un der­nier flamboiement, un dernier sursaut. Quand les convulsions sauvages ont fini d'agiter le ciel après des jours et des jours, quand les milliers d'éclairs, l'interminable concert des coups de tonnerre, les torrents de pluie tiède se déversant avec une violence folle s'apaisent peu à peu et disparaissent, on voit poindre un matin ou un après-midi sous la couche des nuages qui se dispersent un bout de ciel froid et calme, d'une teinte délicieuse. L'automne emplit l'espace et les ombres dans le paysage se font plus précises, plus épaisses; elles per­dent leurs couleurs, mais leurs contours gagnent en netteté, comme un homme de cin­quante ans qui, hier encore vigoureux et plein de vie, a enduré la maladie, la peine, la décep­tion et voit son visage se couvrir soudain de petites rides portant en elles les signes dis­crets de la décomposition. Cet ultime orage est effrayant ; l'agonie de l'été a quelque chose d'atroce, tout comme sa résistance furieuse à la fatalité de la mort, sa colère folle et doulou­reuse, sa façon de défendre corps et âme son existence et de se révolter, alors que cela est vain, alors qu'il est destiné à s'éteindre avec impuissance après quelques sursauts.Mais cette année l'été ne semble pas menacé par une fin aussi brutale et drama­tique (bien que cela puisse encore lui arri­ver) ; il donne l'impression de vouloir mourir de vieillesse, doucement, lentement. Rien n'est plus caractéristique de ces journées, rien ne me fait éprouver aussi profondément l'infi­nie beauté de la fin de l'été que cette heure tardive du soir où je rentre d'une promenade, d'un dîner champêtre composé de pain, de fromage et de vin servis dans une auberge ombragée de la forêt. C'est la disparition de la chaleur, l'arrivée lente et silencieuse de la fraîcheur, de la rosée et la fuite, la résistance discrète, infiniment douce de l'été qui rendent ces soirées uniques. Lorsqu'on se promène deux ou trois heures après le coucher du soleil, cet ultime combat devient sensible à travers des milliers de vibrations infimes. Alors la chaleur du jour se concentre et se tapit dans chaque fourré, dans chaque buis­son, dans chaque chemin encaissé, elle s'ac­croche opiniâtrement toute la nuit à la vie ; elle recherche chaque espace creux, chaque endroit abrité du vent. Sur le versant des col­lines plongé dans la nuit, les forêts deviennent à ces heures d'immenses greniers à chaleur menacés de toutes parts par la fraîcheur noc­turne, et, pour le promeneur, chaque dépres­sion du terrain, chaque cours d'eau, mais aussi chaque type, chaque densité de boise­ment se manifeste de manière précise et infi­niment claire à travers les gradations de la chaleur. J'éprouve en fait exactement les mêmes sensations qu'un skieur. Lorsque celui-ci parcourt un terrain montagneux, il ressent de façon purement physique dans ses genoux mobiles la forme du paysage, c'est­à-dire chaque montée, chaque déclivité, chaque faille longitudinale ou latérale dans la struc­ture de la montagne; si bien que, après s'être entraîné un moment, il est capable, grâce à ces impressions, de reconnaître pendant la descente la géographie générale d'un versant de montagne. De la même manière, c'est grâce aux douces ondes de chaleur que je décrypte le paysage dans l'obscurité profonde d'une nuit sans lune. Je pénètre dans la forêt où je suis accueilli après trois pas seulement par un flot croissant de chaleur, comme s'il y avait là un poêle rougeoyant doucement, et je m'aperçois que cette chaleur augmente puis diminue suivant la densité du boisement. Chaque cours de ruisseau, asséché depuis longtemps mais conservant dans son lit un reste d'humidité, répand autour de lui une fraîcheur qui annonce sa présence. À chaque saison, on sait bien que la température varie selon l'endroit du terrain où l'on se trouve, mais jamais on ne sent ces variations avec autant d'intensité et de netteté que lors du passage du plein été aux premiers signes de l'automne. Alors, ces singulières promenades nocturnes à travers les flots changeants de la chaleur comptent parmi les expériences sensi­tives qui agissent le plus fortement sur notre état d'esprit, notre rapport à l'existence, tout comme le spectacle des montagnes nues tein­tées de rose en hiver, comme la sensation de l'humidité débordante de l'air et de la végéta­tion au printemps, comme les vols nocturnes des vers luisants au tout début de l'été. Je me souviens encore de la nuit d'hier. J'avais quitté l'auberge forestière pour ren­trer chez moi et me trouvais à l'endroit où le chemin creux débouche en direction du cime­tière de Sante Abbondio: avec quelle violence j'ai alors tout à coup ressenti la fraîcheur humide montant des prairies et du lac! Comme la forêt résistait à l'automne, comme l'été résistait à la mort inéluctable! Lorsque l'homme commence à décliner après avoir atteint le faîte de son existence, il se débat ainsi contre la mort, les flétrissures de l'âge, contre le froid de l'univers qui s'insinue en lui, contre le froid qui pénètre son propre sang. Avec une ardeur renouvelée, il se laisse envahir par les petits jeux, par les sonorités de l'existence, par les mille beautés gracieuses qui ornent sa surface, par les douces ondées de couleur, les ombres fugitives des nuages. Il s'accroche, à la fois souriant et craintif, à ce qu'il y a de plus éphémère, tourne son regard vers la mort qui lui inspire angoisse, qui lui inspire réconfort, et apprend ainsi avec effroi l'art de savoir mourir. C'est là que réside la frontière entre la jeunesse et la vieil­lesse. Plus d'un l'a déjà franchie à quarante ans ou plus tôt encore, plus d'un ne la sent que plus tard, à la cinquantaine ou à la soixantaine. Mais c'est toujours la même chose: au lieu de nous consacrer à l'art de vivre, nous commençons à nous tourner vers cet autre art, au lieu de façonner et d'affiner notre personnalité, nous sommes de plus en plus occupés à la déconstruire, à la dissoudre et soudain, presque du jour au lendemain,nous avons le sentiment d'être devenus vieux. Les pensées, les centres d'intérêt et les senti­ments de la jeunesse nous sont désormais étrangers. C'est dans ces instants où l'on passe d'un âge à un autre que le spectacle dis­cret et délicat de l'été qui s'éteint et disparaît progressivement peut nous saisir et nous émouvoir, emplir notre cœur d'étonnement et d'horreur, nous faire trembler et sourire à la fois. Déjà la forêt a perdu sa couleur verte d'hier, les feuilles de vigne ont des reflets plus dorés et les raisins qu'elles cachent prennent une teinte bleu et pourpre. Quand le soir tombe, les montagnes se parent de violet et le ciel de tons émeraude annonçant le passage à l'automne. Mais qu'advient-il alors? Alors c'en est fini des soirées passées dans les caves à vin, des après-midi de baignade au bord du lac d'Agno et de la peinture, dehors sous les châtaigniers. Alors heureux celui qui peut retourner à la tâche utile qu'il aime tant, auprès de personnes chéries ou de quelque patrie que ce soit! Celui qui n'a pas cette chance, qui a perdu cet espoir illusoire se glisse dans son lit avant que le froid ne s'ins­talle ou bien prend la fuite et, devenu voyageur, regarde çà et là en spectateur les hommes qui ont une patrie, vivent au sein d'une communauté, croient à leur métier et à leurs occupations. Il les regarde travailler, se donner du mal, faire des efforts, mais au-des­ sus de toute leur bonne foi, de tous leurs sacrifices, il aperçoit les nuages de la pro­chaine guerre, du prochain bouleversement, qui se forment lentement, sans crier gare. Les gens capables de voir cela sont les oisifs, les incrédules et les déçus, ces êtres devenus vieux qui ont abandonné leur optimisme ancien et donnent libre cours à leur tendre et discrète prédilection de vieillard pour les vérités amères. Nous les vieux, nous regar­dons le monde devenir chaque jour plus admi­rable sous les drapeaux des optimistes, nous regardons les nations se sentir les unes après les autres plus proches de la perfection, plus infaillibles, plus autorisées à faire usage de la violence, à agresser joyeusement les autres. Nous observons le monde de l'art, du sport et de la science où surgissent les nouvelles modes, les nouvelles étoiles, où les noms étin­cellent, où les journaux regorgent de super­latifs. Tout cela est brûlant de vie, d'ardeur, d'enthousiasme, on y voit luire la volonté farouche de vivre, la volonté exaltée de ne pas mourir. Comme les vagues de chaleur dans les forêts du Tessin, les déferlements d'en­thousiasme se déchaînent les uns après les autres. Le spectacle de la vie a quelque chose d'éternel et de violent; certes, il n'a pas de contenu, mais c'est un mouvement perpétuel, un combat incessant contre la mort. Bien des choses agréables nous sont encore promises avant que nous ne nous engagions dans l'hiver. Les raisins bleutés vont devenir moelleux et sucrés, nous allons entendre les garçons entonner leurs chants pendant les vendanges et admirer les jeunes filles coiffées de leur foulard coloré, se tenant dans les feuil­lages jaunissant des vignes comme de belles fleurs des champs. Bien des choses agréables nous sont promises, des choses qui ont aujourd'hui encore un goût amer mais qui nous sembleront si délicieuses lorsque nous serons mieux initiés à l'art de mourir. Pour le moment, nous attendons que mûrissent les raisins, que tombent les châtaignes, en espé­rant profiter de la prochaine pleine lune. Certes, nous vieillissons à vue d'œil, mais la mort nous apparaît encore bien lointaine. Ainsi un poète écrivit un jour:
Comme il est merveilleux pour les vieilles gens
De goûter un bourgogne auprès du feu
Et de partir enfin sans adieux douloureux ­
Mais pas encore, un peu plus tard, pas maintenant !
Hermann Hesse